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Rentrée littéraire : les coups de cœur des libraires

Annie Spratt 303944

Qui mieux que les libraires pour guider nos pas dans le flots de sorties de cette rentrée littéraire ? Personne. C’est pour cela qu’Ernest a été recenser auprès de ses libraires partenaires leurs coups de cœurs de la rentrée. Cette sélection des libraires est variée, éclectique et simplement pleine de pépites. Au total, 18 coups de cœur des libraires. Rien que pour vous. A vos stylos !

Les coups de cœur de la vibrionnante Lydie Zannini et de la dynamique équipe de la librairie du théâtre à Bourg-en Bresse.

Ernest Magazine L Enfant MoucheL’enfant-mouche – Philippe Pollet-Villard – Flammarion.

Marie n’a pas demandé à venir au Monde, pourtant elle n’en voudra à personne. Anne-Angèle, venue du Maroc pour voir sa sœur à Paris, sera obligée de s’en occuper. Elle aussi n’a pas demandé cette charge. Il faudra bien faire avec, surtout quand elles devront quitter Paris pour la province, le regard des habitants est hostile, l’attitude aussi. Elles se débrouillent.
Marie sera la plus vaillante même si elle ne comprend pas la situation qui se dégrade. Superbe histoire d’enfance, de volonté de vivre, racontée avec affection et tendresse…Philippe Pollet-Villard a su nous dépeindre une image de la guerre des deux côtés du miroir. Merci pour cette vision à travers les yeux de Marie, cette gamine nous hante longtemps après que le livre soit refermé.

Ernest Mag Salle De BalLa salle de bal – Anna Hope – Gallimard

Ella a cassé une vitre à son travail, un jour où l’injustice de sa situation lui paraissait insurmontable.
Quelques heures plus tard, elle se retrouve dans un lieu cloisonné, où personne ne l’écoute, où personne ne cherche à comprendre la réalité de ses tourments. Elle tente de s’enfuir, mais n’y parvient pas… et ne comprend pas ; l’établissement où elle est internée est un asile d’aliénés perdu au milieu de la campagne anglaise. Dans les années 1910, s’y mélange une population hétéroclite : des schizophrènes, des soldats de la première guerre meurtris par les souvenirs, mais aussi des révoltés, des petites gens qui ont refusé l’ordre établi. Charles, le médecin, jette un regard attendri sur ces hommes, ces femmes, des rêves de progrès plein la tête. Passionné de musique, il ouvre la salle de bal tous les vendredis soirs pour y installer un orchestre, et faire danser les fous. Le destin d’Ella va basculer un soir de bal ! Quand ses yeux perdus et sauvages vont croiser un regard sombre au fond de la pièce… Anna Hope nous montre encore une fois avec génie les failles de l’âme humaine, à travers une histoire d’amour sensible et enivrante. Très bien documenté et inspiré de sa propre histoire familiale, ce roman nous prouve que les fous ne sont pas toujours ceux qu’on croit… MAGISTRAL !

Ernest Mag Souvenir De La Maree BasseSouvenirs de la marée basse – Chantal Thomas – Seuil

Chantal Thomas dresse un magnifique portrait de sa mère : femme nageuse, amoureuse de l’océan, femme fragile qui se perd, femme forte qui se recrée.
C’est tout en ambivalence que l’auteur affine sa perception de l’être qui fut à la fois son tuteur mais aussi sa recherche d’individualité.

Car en peignant sa mère, Chantal Thomas jette un regard ému sur l’enfance, sur les plages d’Arcachon, les premiers jeux dans le sable, la figure du grand-père, l’imagination et ses rêves.

Ce récit autobiographique est bouleversant. L’auteur sait trouver les mots justes pour recréer avec finesse le portrait de cette femme au parcours étonnant et de sa quête de liberté.

Point CardinalPoint Cardinal –  Léonor de Récondo – Sabine Wespieser Editeur

Léonor de Récondo est une grande Dame de l’Écriture. L’émotion m’a accompagnée tout au long de ma lecture. On ne peut pas lire cet ouvrage sans se mettre dans la peau de Laurent. Laurent se sent autre – Il décide de changer de vie – Au vu et au su de tous.
Les risques de tout perdre ne lui font pas peur et c’est justement parce-qu’il ose qu’on l’aime. Laurent est un homme vrai.
Courage et détermination seront ses deux moteurs. Je ne vous dis pas pourquoi. Lisez !
Léonor de Récondo est une magicienne. Suivez sa baguette magique, vous serez enchantés !

Les coups de cœur de Mathilde Guiraud de la Librairie Delamain, à Paris 1er arrondissement. Mathilde était invitée de notre Ripaille numéro 4.

Ernest Mag Deslaumes ViolencesEtienne Deslaumes – violences ayant entrainé la mort sans intention de la donner – Buchet Chastel.

Etienne Deslaumes transforme un matériau simple en apparence (les monologues intérieurs de personnes se rendant à un enterrement) en un roman polyphonique percutant et poignant.

Il décrypte avec virtuosité les regrets, les ratés, les secrets, les déceptions, les rêves brisés, les frustrations, les espoirs , les échecs de ses personnages, de leur vie, de la nôtre peut-être… c’est aussi amer que plein de lumière, c’est l’un des plus beaux livres de cette rentrée.

Ernest Mag Sitting BullClaire Barré – Pourquoi je n’ai pas écrit de film sur Sitting Bull – Robert Laffont

Il existe des livres qui ouvrent des portes que vous ne pensiez jamais pousser… Claire Barré raconte sa découverte du chamanisme, et c’est surprenant, passionnant, elle bouscule nos certitudes et on l’accompagne avec intérêt dans son cheminement spirituel sur la trace des amérindiens.

Une vraie expérience, racontée avec une franchise déconcertante et beaucoup d’émotion, que vous pouvez lire même (et surtout) si vous avez les pieds bien ancrés dans la terre.
Un livre pas illuminé du tout, mais lumineux !

La sélection des libraires de l’excellente librairie L’Autre Monde à Avallon (89) dirigée par la géniale Evelyne Levallois.

Ernest Mag Lamour Est Une Maladie OrdinaireL’amour est une maladie ordinaire – François Szabowski – éditions Le Tripode

Sans doute le roman le plus drôle que nous ayons lu cette rentrée !
Notre héros, parce qu’il sait que l’amour ne dure que s’il meure en pleine gloire, décide de simuler sa mort auprès de la femme de sa vie pour que, toute sa vie, elle l’aime comme elle l’aimait au jour de sa mort. Et croyez-moi, être mort n’est pas un exercice facile tous les jours pour qui est bien vivant !
Mais quand on a gouté une fois à l’amour absolu, comment ne pas succomber une seconde fois, et peut-être même une troisième, voire une quatrième fois ? Alors là, vraiment, la situation se complique…
Mené de bout en bout avec humour et brio (un exercice littéraire très compliqué s’il en est), cette comédie sait aussi se montrer grave et profonde. Un régal mais dont la longueur en bouche est digne d’un grand cru !

Ernest Mag Un Certain M PiekielnyUn certain Monsieur Piekielny – François-Henri Désérable – Gallimard

Et si on rigolais un peu ? Avec des romans drôles… parce que le sérieux a ses limites, nom de nom !
Un roman biographique sur Gary ? Vous vous dite que ça peut être bien mais que ça va être un peu pépère en terme d’écriture ou de suspens… et puis Gary a déjà écrit la Promesse de l’aube alors pourquoi diable aller lire Désérable ?
Et bien ce roman biographique (car il s’agit bien de cela et de rien d’autre, ne nous y méprenons pas) n’est pas chiant du tout, bien au contraire : il sait se montrer drôlatique et farfelu !

C’est sans doute pour éviter l’ennui mais aussi l’obligation de devoir coller à la vie du grand homme, et à sa légende pour le moins encombrante, que Désérable choisit de raconter la vie de ce M Piekielny que Gary cite vaguement dans la Promesse de l’aube et dont on ne sait rien : rien ne saurait entraver l’imagination et la verve de Francois-Henri. Un bonheur !

Ernest Mag Underground RailroadUnderground Railroad – Colson Whitehead – Albin Michel

Alors voilà, tout le monde va vous dire que Whitehead, c’est le chef d’œuvre de cette rentrée littéraire ! et toute la presse ne parlera que de lui (lisez d’ailleurs la très chouette interview parue dans Télérama cette semaine !)…
Et bien, pour une fois, tout le monde a raison : Underground Railroad est un chef d’œuvre !

C’est une odyssée à travers les États-Unis esclavagistes. C’est la fuite éperdue de Cora, jeune femme noire de 16 ans, qui ayant fui la plantation où elle est née, tentera de trouver où se trouve son Ithaque, l’endroit où elle pourra enfin vivre sa vie sans crainte, loin du chasseur d’esclave qui le recherche inlassablement.
Alors, évidemment, on suit Cora dans sa course mais c’est aussi le paysage qui défile derrière elle qui nous bouleverse : l’esclavage bien sûr mais aussi tous ceux qui luttent contre (Blancs et Noirs), un pays gigantesque qui se construit sur le sang d’une frange de sa population… Un style puissant mais tout entier au service de son récit : du grand art !

Ernest Mag Tour Abolie MordillatLa tour abolie – Gérard Mordillat – Albin Michel

La tour Magister est une des nombreuses tours qui composent le paysage de La Défense. Dans ces tours, c’est le destin du monde qui se joue : magnats de la finance, consortiums qui rachètent le monde et donnent (ou pas) du travail aux peuples, assureurs qui assurent tout et rien mais au niveau mondial… C’est d’abord de cette économie mondialisée qui a oublié l’Humain qui l’a créée et au service duquel elle était sensée être, dont nous parle Gérard Mordillat ; mais il nous parle surtout des laissés pour compte de cette économie capitaliste brutale et déshumanisée.
A travers une vaste galerie de personnages, c’est un panorama (à la fois, drôle, cru et dur) de notre société que nous dresse Mordillat : « Quand les pauvres n’auront plus rien à manger, ils mangeront les riches ! ». Malgré la noirceur du propos, Mordillat ne se départit pas de son humour et de sa gouaille, pour notre plus grand plaisir.
Romancier reconnu (Les Vivants et les Morts, Vive la sociale, La Brigade du rire ), réalisateur et documentariste patenté (la série Corpus Christi pour Arte par exemple), Gérard Mordillat sera l’une des grandes voix de cette rentrée littéraire et sera présent à Avallon le 30 septembre à la librairie L’Autre Monde.

Les coups de cœur de Benoît Minville, libraire à la Fnac de la Défense.

D’immenses growls d’amour pour ces livres français qui blastent. Masse de copines et copains libraires ont aimé aussi et c’est chouette. Faisons en de belles ventes. Ces textes le méritent.

Ernest Magazine Ma Reine Def3Ma reine – Jean-Baptiste Andréa- Editions Iconoclaste

Immense bravo. Je veux en vendre des tirages entiers. Il fait parti des finalistes du prix Fnac. C’est mon chouchou. J’ai adoré ce conte d’enfance intelligent et touchant qui te met souvent le sourire et la poussière dans l’œil. Tu aimeras Shell, garçon différent et “sa reine”.

Le genre de livre qui te réjouis à chaque fois que la couv retombe sous les yeux et sur lequel tu lâches un…”ah ma reine, quelle merveille”.

Ernest Mag Livre Que Je Ne Voulais Pas Ecrire

Le livre que je ne voulais pas écrire – Erwan Larher – Editions Quidam

Écrire sur le Bataclan, quand on l’a vécu et qu’on ne voulait pas écrire dessus c’était pas gagné.
Perso ce roman, je ne voulais pas le Lire.
Mais je l’ai lu.
Et c’est devenu un livre dont je parlerai longtemps en librairie.
Je ne dirai qu’une chose :
For those about to live, love, rock, we salute you.
Ce livre c’est l’énergie d’une Les Paul qui lâche des riffs imparables et entêtants.
Car ce livre transpire la vie.

Ernest Magazine Sucre NoirSucre noir – Miguel Bonnefoy – Rivages

C’est la quintessence et la beauté de la plume et du panache dans le roman d’aventure.

C’est des pirates et une langue qui t’embarquent comme dans ces romans que tu lisais gamin de façon effréné et sans même t’en rendre compte.

C’est un souffle de bonheur que de voir ces thèmes si bien traités dans un texte sans défaut.
Le rivage des grands bouquins.

Ernest Mag Jusqua La BeteJusqu’à la bête – Timothée Demeillers – Asphalte

Roman whitetrash frontal.

Roman social du basculement d’un type qui se débat dans le Monde qu’on lui impose ainsi qu’à ceux qui l’entourent.

Un roman à l’écriture implacable et fascinante qui restitue le gout du sang, l’odeur de mort de ce petit Blanc qui use sa vie dans un abattoir.
Le buddy Yan encore Du noir en cause très Bien, à nous libraires d’en causer Aussi en librairies et de vendre ce roman noir.

La France périphérique et ses petits blancs sont dans plusieurs romans de cette rentrée.
Sujet qui me touche particulièrement.

Les coups de coeur d’Olivier Gallais de la Librairie Idéale à Paris. Il était invité de notre Ripaille #4.

Ernest Mag Mon Amie AdeleMon amie Adèle – Sarah Pinborough – Préludes – traduit de l’anglais par paul Bénita. Sortie le 27 septembre

Louise et Adèle sont dans un bateau…
A travers la voix de ces deux héroïnes, embarquez dans un angoissant voyage aux confins de la psyché humaine.
Qu’est-ce que l’amitié ? L’amour ? Jusqu’où peut-on aller pour se faire aimer ?
La réponse hallucinante à la fin ultime de ce suspense psychologique vous fera regarder d’un autre oeil votre conjoint(e).
#findeDINGUE

Ernest Mag Courage RivieresLe Courage qu’il faut aux rivières – Emmanuelle Favier – Albin Michel

“I am a woman in love…” Manushe est une “vierge jurée” à la vie bien rangée et millimétrée. Jusqu’au jour où le mystérieux Adrian débarque au village et va faire exploser le corset imposé par sa condition. Un premier roman étonnant, plein de vie, à l’écriture juste, précise, délicate et qui ne laisse pas de marbre. Un livre sur le regard (le propre comme celui des autres), les apparences. Une très belle découverte !

Les coups de cœur de Valérie Caffier – invitée des Ripaille #1 et #3 – et libraire au Divan, Paris 15eme

Ernest Mag Wagamese Jeublanc 102Jeu Blanc – Richard Wagamese – Editions Zoé – traduit de l’anglais (Canada) par Christine Raguet

Saul Indian Horse, Ojibwé de l’Ontario, raconte comment il a été enlevé pour être (ré)éduqué à penser et agir « correctement », dans un pensionnat tenu par des prêtres, dans le Canada britannique des années 70. Sa bouée de sauvetage : le hockey sur glace, qui va transformer sa vie et le sauvera peut-être. En moins de 300 pages, Richard Wagamese parvient à nous faire ressentir cette blessure profonde –le roman est inspiré de sa propre vie- et l’inhumanité de ses bourreaux. Sans complaisance ni apitoiement, il raconte comment il s’est retrouvé, quelques années plus tard, dans ce centre de désintoxication, d’où il raconte son histoire. Il évoque aussi en de superbes pages la nature, la culture Ojibwé et les liens profonds qui l’unissaient à sa famille, notamment sa grand-mère.
Ce livre est un bijou et une puissante charge contre le racisme, à l’instar d’un Black Boy de Richard Wright. Grand merci aux Editions Zoé qui nous permettent avec cette seconde traduction de lire cet auteur décédé l’année dernière. La grande claque de la rentée.

Ernest Mag Les Hommes MorgieveLes hommes – Richard Morgiève  – Editions Joëlle Losfeld

Mietek, jeune homme cabossé par une enfance difficile, est devenu voleur de voitures, ce qui lui valut quelques années de prison.  A sa sortie, il tente de reprendre sa vie en main, mais sa trajectoire le ramène souvent vers la marge, qu’il connait bien. Les femmes, les magouilles, les voitures : telles sont les priorités des Hommes de Morgièves « une espèce en voie de disparition, (…) les derniers singes ».

Un monde ressuscité avec talent et sincérité par un Richard Morgiève en grande forme et une émotion pure et limpide qui traverse les pages.

Un vrai plaisir de lecture, le bonbon de cette rentrée.

Photo de Une by Annie Spratt on Unsplash

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