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La sobriété est ailleurs

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“Sobriété, sobriété, sobriété” entend-t-on ici ou là. Et, à force de l’entendre, se souvenir dans une étonnante association d’idées de De Gaulle qui lançait qu’il ne suffisait pas de sauter sur sa chaise comme un cabri pour faire que les choses adviennent. Entendre aussi les injonctions : col roulé, doudoune, économies d’énergie, chauffage à 19°C etc. qui rivalisent d’ingéniosité pour nous conduire vers un chemin de vie plus sobre. Sourire. Se dire qu’en fait la sobriété est ailleurs. Évidemment toutes les préconisations du gouvernement qui relèvent simplement de la théorie comportementale dite du nudge qui vise à modifier en douceur les habitudes sont intéressantes, pour ne pas dire indispensables et de bon sens, mais elles ont un problème majeur : celui de la désirabilité. Aussi comme ici chez Ernest nous sommes des gens sympathiques, nous allons aider la communication gouvernementale sur la sobriété à devenir plus désirable.

La sobriété est ailleurs. Elle se situe quelque part entre les lignes des romans, dans les notes d’une mélodie qui alpague, dans les couleurs d’un tableau, dans la puissance d’un orgasme partagé, dans la danse chaloupée dans un bar, dans une larme qui vient à la vue d’une photo émouvante, dans les rires entre amis, dans le cœur qui bat avant un premier rendez-vous, dans la puissance évocatrice d’un poème, dans la présence apaisante et revigorante d’un coucher de soleil, dans la vue majestueuse en haut d’une montagne que l’on vient de gravir, dans un livre lu avec un col roulé au coin du feu, dans la mer que l’on chérit en homme libre, dans l’attente incertaine et géniale de l’autre, dans l’exquise sensation d’une affinité élective… La liste à la Prévert pourrait encore être plus longue. Elle est infinie.

La sobriété est ailleurs, en ce sens qu’elle pourrait être l’occasion de nous inviter à une forme de recentrement autour de la recherche de la beauté. Celle qui nous correspond. Sans que l’une soit une exclusion de l’autre, d’ailleurs. Sobriété bien ordonnée commence par soi-même.
Aussi n’oublions pas, chers amis, de partir une journée ou un week-end avec nos amours, voir des couchers de soleil, sentir les embruns de la mer ou gravir des montagnes, n’oublions pas de partager avec des êtres aimés tous les morceaux d’architecture artistiques qui nous émeuvent.

Chers amis, devenez sobres : baissez la lumière, attrapez un livre, blottissez-vous dans des bras accueillants ou dans votre canapé préféré et voyagez avec les aventures de Dantès par exemple. Chers amis, devenez sobres et n’oubliez pas de rire. A gorge déployée. “Une journée sans rire est une journée de perdue”, prévenait Charlie Chaplin.

Chers amis, devenez sobres et n’oubliez pas de partager des orgasmes. Chers amis, devenez sobres et surtout, surtout, créez vous des souvenirs qui, de par la chaleur qu’ils diffusent en vous, vous permettront de ne chauffer qu’à 17°C au lieu de 19°C lorsque l’hiver sera là.
Chers amis, devenez sobres, faites comme Carole Zalberg dans son très joli nouveau livre « Song book » et souvenez-vous des musiques qui vous ont construits et les souvenirs qu’elles charrient avec elles.
Chers amis, devenez sobres et ouvrez le compas de votre curiosité sur toutes les formes d’art, même les plus marginales. Elles nourriront chez vous quelque chose. De la colère, peut-être. De l’incompréhension, aussi. Mais plusieurs d’entre elles seront les sources d’un invincible été qui naîtra en vous et qui vous permettra d’affronter non seulement le froid, mais aussi et surtout les petites bassesses du quotidien.

Chers amis, devenez sobres et faites des choses folles. Des choses inattendues. Des choses qui vous étonneront vous-mêmes. Des choses qui laisseront une empreinte indélébile. Pour être vivants.

Chers amis, devenez sobres et additionnez les plaisirs de la beauté de l’art et de la vie. Ceux accessibles à tous et toutes. Il est temps de se quitter pour ce dimanche. La lumière est tamisée, la musique accompagne l’activité, et l’immensité de l’art et des possibles de la vie s’offrent à nous. Cueillons-les. Ils nous attendent.

Bon dimanche sobre.

PS : Ernest a (toujours et encore) besoin de vous. En cette rentrée, réabonnez-vous ou invitez-vos ami(e)s à nous rejoindre. Par là.

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