Le mur d’une ville. Un pochoir. Ses mots poétiques. Ses personnages expressifs. Miss Tic, artiste plasticienne, est poète. Sauvée par la poésie, elle l’a embrassée puis affichée. Engagée, la street artiste nous explique, avec rires, sa liberté de transmettre et sa passion des livres.
« Plaisir d’offrir, joie de recevoir (avec un grand éclat de rire). Je suis passionnée par la lecture. J’aime bien partager ce que j’aime. C’est un acte intime, comme un message que l’on n’ose pas toujours dire ou mal dire. Cela permet de transmettre un savoir ou une compréhension tout en partageant son propre goût.
Offrir un livre va dépendre des situations : des personnes et du contexte. Par exemple, j’ai offert récemment à mon jeune assistant Les lettres d’un jeune poète de Rainer Maria Rilke (Insel, 1929) car cela a un rapport avec la création. Cela dépend vraiment des gens et du moment. C’est très varié. Le livre que j’offre devient mon messager. J’offre des livres aux personnes qui aiment la littérature. Je ne ferai pas le même choix pour quelqu’un qui n’a pas l’habitude de lire. A l’âge de vingt ans, j’ai découvert Georges Pérec et surtout La vie mode d’emploi (Editions Hachette, 1978). Pendant des années, j’ai offert ce même livre à plein de gens. Ses éditeurs vont me remercier car j’en ai acheté un paquet (rires). Puis, j’ai découvert Chantal Thomas grâce à Comment supporter sa liberté ? (Payot et Rivages, 2000). Comme il s’agit de liberté, d’indépendance et du statut de la femme, je l’ai beaucoup offert à mes amies. Il est très joliment écrit. Quand je découvre un auteur, je me mets à lire à peu près tout ce qu’il a écrit. Depuis j’achète les livres de Chantal Thomas régulièrement. J’étais contente car elle a été nommée à l’Académie française.
Jeune le Le deuxième sexe de Simone de Beauvoir (Gallimard, 1949) m’avait bouleversé et donné à penser. Ces dernières années, j’offre plutôt King Kong théorie de Virginie Despentes (Grasset, 2006) aux filles de mes amies ou aux jeunes femmes. Pour les nouvelles générations, cet ouvrage est absolument formidable. Il traite du même sujet.
Les livres permettent d’approfondir la compréhension des choses. Ils donnent des clés. Je lis beaucoup d’auteurs femmes. Très jeune, dans la bibliothèque de ma mère, j’ai découvert Françoise Sagan. Pour moi, Lydie Salvayre est un très très grand auteur. Annie Lebrun qui est une immense penseuse n’a pas l’attention des médias qu’elle mérite. Ceci dit, je trouve qu’en littérature, on ne fait plus tellement de différence entre les hommes et les femmes. Alors que dans les art plastiques, le travail des femmes peintres est encore très dévalorisé. Il n’a pas la même valeur et il n’est pas représenté de la même façon que celui des hommes. En peinture, on devrait prendre exemple sur la littérature.
“Je dois énormément aux livres”
La littérature et la poésie m’ont sauvé ! Je dois énormément aux livres. Ils sont des amis. J’ai choisi le champ poétique pour m’exprimer dans ma création. Quand j’ai débuté mon activité artistique. Les autres artistes urbains ne produisaient que des images. J’ai voulu introduire des mots et offrir une parole, une pensée. Je n’aurai pas fait ce que je fais si je n’avais pas mis du texte. Il y avait une telle production d’images que je ne n’aurais pas vu la nécessité d’y mettre mon grain de sel (rire). Je préférais innover avec l’écriture et donner du sens. Tous les auteurs que j’aime m’ont confortée, consolée, interrogée. Parfois on ne sait pas très bien formuler ou théoriser ses pensées. Alors, quand je trouve un bon livre, j’ai le sentiment que l’auteur l’a écrit pour moi.
J’ai offert à une amie Sorcière : les sorcières, de circée aux sorcières de Salem (Editions du Chêne, 2020) d’Alix Paré. J’étais tiraillée entre lui offrir et le garder. Finalement, je le lui ai offert. Puis, deux jours plus tard, une autre amie m’offrait ce même livre. J’ai trouvé cela magique.
Quand j’ai publié mon premier livre, j’étais trop contente. Glisser un livre de moi dans ma bibliothèque parmi mes auteurs préférés fut un orgasme pour mon égo (rires).
Photo de Une crédit : Jace
Capture écran œuvre Miss Tic “L’art et la vie ne font qu’un”.
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