e matin, dimanche, nos mamans à l’honneur forcément. Que le lecteur ou la lectrice n’y voit pas un moyen de prendre partie dans les simagrées gouvernementales autour du Maréchal Pétain. Les choses sont en effet très claires. Le parti d’extrême droite, en France, descend clairement du maréchal Pétain. L’histoire est têtue, et il serait facile de délayer pendant plusieurs dimanches tous les faits qui en attestent, mais ce n’est pas le lieu et cela serait faire trop d’honneur à des bêtises. L’histoire est têtue et donc le parti d’extrême droite français descend bien du pétainisme. N’en déplaise aux hurluberlus du en même temps. L’histoire est têtue, disions-nous, tant et si bien que la fête des mères est – de facto – célébrée en France depuis les années 20, et depuis l’Antiquité partout si l’on en croit les historiens. Ce que l’affreux maréchal a institué, lui, c’est le fait que les enfants préparent à l’école la fête de leurs mamans, faisant ainsi de la famille le pivot de sa politique d’extrême droite nationaliste. C’est donc par la décision pétainiste que sont nés les colliers de nouilles et autres joyeusetés que les mamans reçoivent ou non de leurs marmots à chaque dimanche de fête des mères.
Puisqu’il s’agit, ici, de littérature, d’imagination et de création comme outil de résistance, mais aussi comme levier pour construire le monde, les rêveries du dimanche dessinent une forme d’alter fête des mères. Une fête où tous les écoliers de France confectionneraient non pas des colliers de nouilles mais seraient invités à créer des poèmes pour les mamans, accompagnés par des écrivains et des écrivains. Pour toucher du doigt le sentiment poétique mêlé à l’amour des mamans. Il serait aussi possible d’imaginer une grande ruée vers les librairies afin d’offrir à nos mamans des livres. Des livres avec des héroïnes inspirantes. De celles qui façonnent – par l’expérience sensible de la littérature – les imaginaires. Elles s’appellent : Lisbeth, Hermione, Victoria, Modesta, Claire, Adèle ou encore Céleste (Leurs portraits sont ici)
Repenser à ses héroïnes. Se sentir pousser des ailes. Pour rêver à une fête des mères qui deviendrait aussi et surtout une fête des droits et de l’émancipation des femmes. Égalité salariale, et aussi une plus grande liberté donnée aux femmes (et donc parfois pour ne pas dire souvent aux mères) notamment dans le regard que la société leur porte. Forcément, en ce jour, songer aux mères célèbres de la littérature. Mina qui fit écrire à son fils : “Il n’est pas bon d’être tellement aimé, si jeune, si tôt. Ça vous donne de mauvaises habitudes. On croit que c’est arrivé. On croit que ça existe ailleurs, que ça peut se retrouver. On compte là-dessus. On regarde, on espère, on attend. Avec l’amour maternel, la vie vous fait à l’aube une promesse qu’elle ne tient jamais. On est obligé ensuite de manger froid jusqu’à la fin de ses jours. Après cela, chaque fois qu’une femme vous prend dans ses bras et vous serre sur son cœur, ce ne sont plus que des condoléances. On revient toujours gueuler sur la tombe de sa mère comme un chien abandonné. “
Ou à celle à qui Robert Merle a dédié un livre. “Fils des mères encore vivantes, n’oubliez plus que vos mères sont mortelles. Je n’aurai pas écrit en vain, si l’un de vous, après avoir lu mon chant de mort, est plus doux avec sa mère. Aimez-la mieux que je n’ai su aimer ma mère. Que chaque jour vous lui apportiez une joie, c’est ce que je vous dis du droit de mon regret, gravement du haut de mon deuil.”
Émancipation des femmes, droits des femmes. Forcément, Simone de Beauvoir rode dans notre esprit. La faute, peut-être, à un podcast récent de l’excellentissime Philippe Collin qui après Blum, Le Pen, Pétain, vient de réaliser un portrait magistral de Simone de Beauvoir. Si l’on devait retenir qu’une seule idée : « Simone de Beauvoir ce n’est pas les femmes contre les hommes, mais les hommes avec les femmes », dans leurs combats. Se dire que ces lignes dominicales sont une minuscule pierre, mais qu’elles constituent tout de même une pierre. Une pierre pour ses mères dont un proverbe Yiddish dit qu’elles ont été inventées par Dieu car il ne pouvait pas être partout.
Une pierre pour toutes nos mères, mais aussi une pierre pour toutes ces mères qui jonglent, qui se mettent entre parenthèses, pour leurs enfants et aussi parce que la société n’est pas forcément prête à ce qu’elles prennent toute leur place. Il est plus que temps. La femme est l’avenir de l’homme dit le poète. L’avenir s’est installé et depuis belle complète un autre. De cette fête qui n’est là que pour glorifier la famille, passons à la fête internationale de l’émancipation des femmes. Les portraits qu’en feront les écrivains et les écrivaines n’en seront que plus beaux.
Bon dimanche,
Tous nos éditos sont là.