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Civilisation, j’écris ton nom…

Matthew Essman Kswnnx95 YU Unsplash

Et si dans 350 ans, alors que nous dormirons tous et toutes d’un dernier souffle apaisé, un romancier prenait la plume pour se demander ce qui serait advenu si l’humanité dans son ensemble avait réellement ouvert les yeux sur la crise écologique et avait collectivement compris que soit elle changeait, soit ce sont les circonstances qui la changeraient. Cela donnerait certainement un roman fort, très interpellant et controversé puisque dérangeant. Imaginons encore que ce roman sorte au mois de septembre, qu’un Français l’ait écrit et qu’il soit l’un des évènements de la rentrée littéraire. Les lecteurs seraient ravis de pouvoir s’imaginer ce qui serait arrivé si…
Heureux que nous sommes, lecteurs de 2019, en cette rentrée littéraire, un tel livre existe. Il est signé CivilizationsLaurent Binet et s’intitule “Civilizations” (Grasset, 19 euros). Le pitch est simple : Binet imagine un monde dans lequel Christophe Colomb n’a pas découvert l’Amérique et où les Incas ont débarqué en Europe puis ont pris possession de celle-ci, dessinant par la même occasion un monde très différent que celui dans lequel nous vivons actuellement. Binet dit avoir trouvé l’idée de ce roman dans l’essai  de Jared Diamond “De l’inégalité entre les sociétés“. Diamond, auteur essentiel sur ce que sont les civilisations, nous vous en avions parlé ici.

Une littérature ambitieuse et festive



Dans ce livre, Diamond expliquait qu’il avait manqué les anticorps, le fer, le cheval aux Incas pour dominer l’Europe. Binet, en romancier, résout ce petit problème et emporte le lecteur dans une épopée époustouflante, convoquant les grandes figures de l’époque de Thomas Moore à Erasme en passant par Charles Quint. En s’amusant de la sorte, Binet tend un miroir à notre monde, nous rappelle qu’il est mortel et qu’il aurait pu être tout autre. Mieux encore, Binet crée des personnages inoubliables au premier rang desquelles la princesse Higuénamota dotée d’une intelligence rare et d’une nudité révolutionnaire, mais aussi le roi Inca Atahualpa personnage réel qui devient dans le roman un héros romantique lecteur de Machiavel et anti-clérical avant l’heure.
 Ce livre est un régal, en ce sens, qu’il remplit conditions d’un grand livre : être ambitieux et original quant à son propos, et nous faire réfléchir sur notre présent. La littérature, quand elle a cette saveur, est une fête !

Bonne rentrée.

Tous les éditos d’Ernest sont là

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