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Houellebecq président !

Houellebecq Président

Michel Houellebecq possède-t-il un destin Élyséen ? Renaud Large s'est penché sur la question en imaginant un scénario de politique fiction croustillant à souhait.

Comme à l’accoutumée, les éditorialistes politiques n’avaient rien vu venir. Avec le recul, l'enchaînement des évènements depuis la réélection d’Emmanuel Macron était pourtant limpide. Michel avait encore berné les “gogos”. anéantir n’était pas seulement son dernier roman, c’était sa rampe de lancement vers l’Élysée. Il y parachevait discrètement son corpus idéologique. Après avoir exploré son conservatisme sur les sujets de société dans Les particules élémentaires ou encore dans Soumission, Michel Houellebecq avait donné corps à son euroscepticisme et à sa fermeté régalienne dans ses écrits politiques. Le désormais candidat brossait sa doctrine économique dans un ouvrage qui bifurquait rapidement sur la fin de vie. Il avait eu le talent de dissimuler cette clé de compréhension économique en quelques pages, dans un ouvrage qui en comptait plus de sept cents. Avec anéantir, l’auteur attrapait le changement de paradigme économique à l'œuvre en 2022, avec le retour de l’État interventionniste. Le ministre de l’Économie du roman, Bruno Juge, renouait avec le colbertisme à la française et sauvait l’entreprise Citroën en la nationalisant. Houellebecq envisageait l’acmé de la “chevenementisation” des esprits pour 2027. Prémonitoire, si l’on y repense.

Un écrivain qui se présente à la magistrature suprême en 2027, voilà un scénario de politique fiction qui fera sourire. Mais après tout, l’Ukraine a élu un comédien de série télévisée, la Californie un ancien acteur bodybuildé et les États-Unis, un milliardaire star de la téléréalité. L’Italie a longtemps été attirée par le parti d’un ancien comique et un ex-acteur porno a brigué le palais de Quirinal. La France ne s’est-elle pas confiée à un banquier d’affaires ? Alors pourquoi pas un écrivain à succès ? Quoi de plus logique dans le pays dont André Malraux a été le ministre de la Culture iconique et Chateaubriand un ministre des Affaires étrangères éphémère ? Nous avons d’ailleurs été pionniers en matière de candidature fantasque. Durant la campagne présidentielle de 1981, Coluche avait lancé sa campagne comme une blague avec quelques marqueurs de gauche. Très vite, une dynamique de campagne s’était mise en place avec l’attrait des abstentionnistes écœurés de la politique. Puis, finalement, la campagne s’était élargie hors des bastions traditionnels de la gauche et de l’abstention pour voir les petits commerçants et artisans – notamment le CIDUNATI de Gérard Nicoud – se rapprocher du comique.

"Ai-je l’air d’un clown qui pourrait déclencher un mouvement ?"