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Simone, Inna, Masha et les autres

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Concordance des temps. Cette semaine, la résistante Simone Ségouin s’est éteinte. A 97 ans. Agée d’à peine 16 ans, elle s’engage très vite dans la résistance à l’occupant allemand durant la seconde guerre mondiale. Vole une bicyclette, fait passer des messages, et devient en quelques mois le principal agent de liaison d’Eure et Loir pour la résistance. Mais elle ne s’arrête pas là. Elle est repérée par les FTP et veut manier les armes. Très vite elle participe avec un courage fantastique à de nombreux combats de rue qui en feront une personnalité respectée dans toute la résistance. Cela jusqu’à la fin du conflit. “J’étais française. L’Allemagne était l’ennemi, nous ne pouvions pas collaborer. Il fallait résister”, disait-elle simplement lorsqu’elle était interrogée sur son engagement. Après la guerre, elle refusera les honneurs et deviendra infirmière pédiatrique et est demeurée jusqu’à sa mort une femme profondément libre. De celles qui décident pour elles-mêmes. Pionnière.

Dans un mouvement dont seul l’actualité a le secret la mort de Simone Ségouin est intervenue la semaine des un an de la guerre en Ukraine. Voir le visage souriant et déterminé de Ségouin dans la résistance. Et voir aussi, sur les nombreux reportages photos ceux des Ukrainiens et des Ukrainiennes qui résistent à l’occupant, qui se battent, et qui veulent vivre à nouveau libres, a conduit l’esprit tortueux de l’auteur de ces lignes dominicales à imaginer quel pouvait bien être le fil ténu, impalpable et universel qui relie Simone à Inna qui se bat sur le front de l’est en Ukraine.

Dans ce lien impalpable, courage, fringale d’une vie meilleure, volonté de ne pas renoncer, sentiment du devoir, et besoin de construire un monde dans lequel le souhait de vivre est au cœur de ce qui meut les hommes et les femmes.

Simone hier en France, Inna aujourd’hui en Ukraine, Masha et toutes les autres femmes d’Iran qui se sont levées contre l’obscurantisme religieux et contre ces despotes qui veulent imposer à tous et à toutes leurs préceptes religieux et /ou politiques. Se souvenir du livre déjà cité ici “Lire Lolita à Téhéran”. Se souvenir aussi de la littérature qui, comme nous le confie Andreï Kourkov (voir notre entretien  avec lui), aide à “tenir bon.” Se demander comment la littérature, demain, racontera les peurs, les doutes, les joies, les amours nées puis perdues dans les batailles d’Ukraine, ou dans les rues de Téhéran.

Se demander si le fil qui vient du passé pour tendre vers l’avenir n’est pas celui d’un papillon. Du papillon qui se transforme mais dont l’enseignement et le parfum demeure de par les générations, grâce aux images, grâce aux mots, grâce aux histoires transmises. Grâce, finalement, à ce qui nous relie ici aussi chaque dimanche. L’idée que l’Homme  – grâce à l’expérience sensible de l’art – a le pouvoir de changer sa vie et donc de changer LA vie. Toujours.

Bon dimanche,

L’édito paraît le dimanche dans l’Ernestine, notre lettre inspirante (inscrivez-vous c’est gratuit) et le lundi sur le site (abonnez-vous pour soutenir notre démarche)
 
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