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Poésies de rue

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Au moment où des militants écolos un brin décérébrés attaquent les tableaux de maîtres à l’aide de soupe ou d’encre noire, un artiste, lui puisque c’est le rôle de l’art, dessine le monde, son humanité et la résistance en même temps qu’il donne à voir de la poésie.

Depuis le début du conflit ukrainien, le street-artiste Banksy a décidé de créer des ses pochoirs sur des mur dévastés en Ukraine. Ici, un homme prenant son bain dans une maison détruite, ici une gymnaste disant la recherche de la légèreté et de la beauté d’un équilibre sur les gravats, là un combat entre deux judokas. L’un Goliath poutinien, l’autre David ukrainien.
Et Banksy de donner la parole, dans une vidéo sur Instagram à des Ukrainiens et aussi de  raconter sa démarche. “De l’art en solidarité avec le peuple ukrainien.”

Des dessins qui, forcément, ont une force symbolique puissante. Le fait que Banksy agisse dans l’ombre sur un territoire en guerre accentue la défiance qu’il renvoie au tyran Poutine. Il se place à hauteur d’homme. Au plus près des gens. Pour dire leur souffrance et leur courage. Les dessins devenant plus forts que des slogans.

Découvrant ces fresques, une boucle de pensée s’est mise en marche. Emmenant l’esprit vers les calligrammes de guerre Apollinaire. Évidemment. Forcément. Ces calligrammes qui découpent les formes et qui concernent autant l’amour qu’il souhaite retrouver avec Lou que la géopolitique européenne.

C’est la réalité des photos qui sont sur mon cœur que je veux
Cette réalité seule elle seule et rien d’autre
Mon cœur le répète sans cesse comme une bouche d’orateur et le redit
À chaque battement
Toutes les autres images du monde sont fausses
 

Écrit-il ainsi à sa Lou adorée. Avant de dire les liens entre les Hommes.

Cordes faites de cris
Sons de cloches à travers l’Europe
Siècles pendus
Rails qui ligotez les nations
Nous ne sommes que deux ou trois hommes
Libres de tous liens
Donnons-nous la main

Le mouvement de pensée a ensuite conduit l’esprit à se tourner vers les mots de Pablo Neruda alors que la guerre d’Espagne faisait rage en 1936 et qu’il était alors consul du Chili en péninsule ibérique.

Il dira à quel point cet événement auquel la guerre d’Ukraine ressemble tant changera son approche artistique. Et il écrit, dans “l’Espagne au cœur”, des mots universels.

Fils préférés de la victoire , tant de fois tombés,
Aux mains tant de fois effacées,
Les cartilages les plus secrets rompus,
Bouches muettes,
Votre silence broyé jusqu’à la destruction:
Mais vous resurgissez brusquement
Tourbillon, une autre fois, d’autres, vous,
Toute votre insondable, votre brûlante
Race de cœurs et de racines.

Le mouvement fut ensuite animé d’une irrépressible envie de replonger avec avidité dans les “feuillets d’Hypnos” de René Char rédigés dans la clandestinité de la résistance.

“Notre héritage n’est précédé d’aucun testament. On ne se bat bien que pour les causes qu’on modèle soi-même et avec lesquelles on se brûle en s’identifiant. Agir en primitif et prévoir en stratège. Nous sommes des malades sidéraux incurables auxquels la vie sataniquement donne l’illusion de la santé.”



La boucle de pensée a ensuite conduit à songer aux mots que l’on a pas encore lus. Ceux que les poètes ukrainiens écrivent en ce moment. Ceux que les poètes du monde entier, confrontés à cette guerre, se mettent à graver. 

La boucle de pensée s’est ensuite arrêtée, un temps. Elle est repartie. Pour se dire que tout cela nous vient du passé, s’ancre dans le présent, pour tendre vers l’avenir. Pour se dire aussi que définitivement, l’Art, sous toutes ses formes est la clé de la survie de notre Humanité.

Bon dimanche,

L’édito paraît le dimanche dans l’Ernestine, notre lettre inspirante (inscrivez-vous c’est gratuit) et le lundi sur le site (abonnez-vous pour soutenir notre démarche)
 
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