3 min

Le féminisme est un érotisme !

Caroline Hernandez AoSfIDX9dgY Unsplash

Et si les mots de la littérature érotique pouvaient aussi être au déclencheur d’une conscience féministe chez les hommes et les femmes ? C’est le pari des trois ouvrages que présente, ce mois-ci, dans son petit cochon Virginie Bégaudeau. Le féminisme est aussi un érotisme !

 

Roz – Erich Von Götha

RozQuand une œuvre de fiction en rejoint une toute aussi belle, c’est jouissif d’avance. Roz, l’héroïne d’Erich von Götha est une admiratrice de la première heure du roman « Emmanuelle » et pour lui faire honneur, elle s’efforce de vivre avec son mari selon les préceptes de son livre fétiche. Je me languis déjà de me glisser sous les draps d’un couple inspiré par l’échangisme à outrance, et de faire une plongée hypnotique dans les eighties anglaises, le tout sous la plume d’une artiste monstrueusement talentueuse de la bande-dessinée érotique.

Mon voyage lubrique commence dès lors que je tiens Roz entre mes doigts. Doigts qui tremblent sous l’extase que l’on me promet et qui explose. Qui manque de me faire imploser surtout. L’amour et l’adultère, paradoxaux et si complémentaires dans le mariage de Roz, m’évoquent les fantasmes des unions sacrées, des rêves interdits des chambres conjugales. L’impensable.

Chef d’œuvre d’érotisme

J’aurais voulu être Roz tout du long mais la place de son mari est tout aussi excitante. Celles des amants et des libertins particulièrement érotiques. Une orgie synchronisée au fil des pages. Roz évolue par le culte vouée à Emmanuelle, son mari se l’approprie à sa manière. L’homme viril qu’il est se retrouve parfois dans des situations qu’il n’avait jamais osé imaginer.

Grâce à la compilation de cette série rarissime, parue dans le magazine Torrid montée de toute pièce et dessinée intégralement par Erich von Götha elle-même, je suis renversée. Un chef d’œuvre pornographique qui résonnera encore longtemps pour ses lecteurs futurs.

 

Sexualités monstres – Valentina Viettro

9782493033000 475x500 1Le titre. Le pitch. Je suis littéralement en 2021. Tendance et contemporain à la fois, le recueil de Valentina Viettro est d’autant plus érotique qu’il expose une sexualité où tout est possible. Sans jugement. Sans tabous. En liberté. J’aime le côté licencieux où l’influence de Virginie Despentes flotte sur l’œuvre.

Je pense à ce coup de foudre d’une femme pour une autre femme tandis qu’elle ne voit ses yeux qu’à travers le niqab. L’idée de transgresser les tabous m’excite alors terriblement. Le blasphème et le « contre-sens », le hors-norme, justement, des préceptes que l’auteur manie avec une sensualité certaine. Je suis immergée dans un spectacle qui est mon quotidien, héroïne d’une société dont je suis la contemporaine. Faire évoluer sa sexualité pour adoucir les mœurs ou les apaiser ? Peut-être, mais sans manque de plaisir. Parce que l’extase s’invite dans l’inconnu.

Ultramoderne jouissance

Le polyamour ou la mouvance #metoo ont un incroyable potentiel érotique. J’en suis friande, avide. Les rencontres de Viettro, je veux les vivres et les sentir. Le comportement de ces femmes qui refusent le patriarcat en explorant leurs propres envies parait cliché, un poil bienpensant, mais la plume est parfaite. Une hymne à la conquête du plaisir, un miroir où le corps des femmes est universel.

Un moment passé où l’alchimie a manqué de me faire perdre la tête tant je me suis reconnue en Valentina, tant j’ai cru qu’un jour, moi aussi, je pourrais témoigner de cette jouissance ultra moderne. Un recueil nécessaire ; lubrique, ludique et franchement impudique.

 

Lola et quelques autres – Régine Deforges

LolaRégine Deforges, maîtresse de l’érotisme au sens le plus noble du terme dépeint la « ville femelle » où toutes les femmes qui flânent sont suspectes. Oser faire l’amour à l’inconnu, avec l’étranger qui rôde derrière nous, c’est exactement ce qui me fait fantasmer. Pourquoi ? Parce que l’émotion de l’inattendu et de la passion promise sont ma quête de vie. Dans ce Paris totalement décadent, j’embrasse le diable sur un quai et réduit l’homme en soumis. Je suis reine d’une sexualité maîtrisée et foutrement jouissive.

Je suis la femme fatalement perverse que Deforges magnifie. Libres, inspirantes, ces femmes sont un symbole d’émancipation absolue que je crève de transmettre et auquel je suis excitée de participer. C’est l’un des trop rares ouvrages à être écrit par une auteure si impliquée, investie, dans le plaisir féminin. Je suis bouleversée, électrisée. Chaque page est une bouffée d’érotisme qui me détourne de la vertu. Pire, de la décence.

Érotisme féminin d’une beauté folle

Une sublime façon de visiter Paris dans les lits des belles câlines en L. Lili, Léonne, Ludovine…De Gare de Lyon à la Coupole, de la rue Mouffetard à Javel, un guide des putains ordinaires comme diraient certains hommes capricieux. Mais du désir à foison et de la nostalgie comme en tendresse. Je déambule de place en place, d’églises en bars célèbres et je frôle la solitude de ses femmes teintées pourtant de joie de fausse pudeur. La tristesse. L’extase.

Je suis amoureuse, à mon tour, de l’idée de ce sexe simple et puissant. De ces réveils dans des draps blancs sous les toits de Paris, ma ville d’amour, ma ville d’émois. Une défense d’un érotisme féminin encore bien trop souvent absent. Honnête. Sublime. Intemporel.

Tous les petits cochons de Virginie Bégaudeau sont là.

Laisser un commentaire