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Pas besoin de faire un dessin

Irene Strong A6XhSbJuLXk Unsplash

Nouvelle chronique de notre camarade Thomas Mourier rédacteur en chef de Bubble, l'appli indispensable pour tous les fans de BD. Une fois par mois, Thomas nous parlera des passerelles entre les bulles et les lignes Avec un code promo à la fin du papier pour découvrir l’application Bubble .  Certains auteurs ne semblent pas avoir de limites, aussi à l’aise dans leurs domaines de prédilection que dans l’exploration de nouveaux médium. Ce mois-ci, on se penche sur quelques auteurs qui, non contents d’avoir publié quelques-uns des chefs-d’œuvre de la bande dessinée, se sont également lancés en littérature avec succès.

Depuis quelques années, les liens entre littérature & bande dessinée se resserrent. Que ce soit autour d’adaptations littéraires en BD, de collections dédiées ou d’incursions de romanciers proposant des scénarios originaux : la frontière s’amenuise entre ces deux médiums. On ne compte plus les succès de librairie entre les adaptations de Jean-Patrick Manchette, les collaborations de Pennac & Florence Cestac ou les scénarios originaux de Tonino Benacquista, Didier Daeninckx ou Ta-Nehisi Coates, Joe Hill et Stephen King aux USA.

Plus rares, certains auteurs de bande dessinée s’invitent au roman. Une incursion en littérature marquante avec un succès qui va bien au-delà des seuls amateurs de bande dessinée, qui auraient suivi leurs auteurs préférés dans les rayons litté. On se penche aujourd’hui sur trois romans qui sont devenus des incontournables, trois livres qui sont déjà des longs sellers de librairie.

Le discours de Fabrice Caro, Folio

 

Le Discours De Fabrice Caro, FolioL’auteur de bande dessinée d’humour le plus célébré & attendu en librairie, depuis son album Zaï zaï zaï zaï, Fabrice Caro (sous le pseudo de Fabcaro) est l’auteur d’une trentaine de bandes dessinées mêlant humour absurde & vision acérée de notre société. Adepte des antihéros et des dialogues mordants, il a commencé à s’affranchir de certains codes de la BD dans ses albums en mettant en scène des silhouettes plus que des personnages, pour incarner des situations plus que des héros. Ses bandes dessinées les plus récentes Et si l’amour c’était aimer, Moins qu’hier (plus que demain) ou Open Bar fonctionnent sur ce schéma et sont une suite ininterrompue de piques sur le quotidien, les habitudes ou les clichés. Il interroge le couple, l’amitié, la vie en société avec cette obsession du paraître et du regard de l’autre.

Il prolonge cette manière d’écrire dans son roman Le discours (Ernest en parlait ici) où un narrateur fait le point sur sa vie autour d’un repas de famille dont tous les détails vont résumer ses quarante ans d’existence, se cristallisant autour de cette demande de prononcer un discours au mariage de sa sœur. Adrien n’en a que pour Sonia et la réponse à un texto qui n’arrive jamais, entre une assiette de gratin maternel et les habituelles discussions avec son beau-frère. Entre ses souvenirs d’enfance, ses non-relations avec sa famille, son histoire avec Sonia et ses ébauches de discours, l’auteur distille son humour pince-sans-rire & mordant. Tout l’art de Fabcaro, et son double Fabrice Caro, réside dans la déconstruction de phrases toutes faites où il souligne l’absurdité & le vide de ces dialogues que l’on entend (ou pire, que l’on prononce) à longueur de journée.