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Au présent

Jon Tyson FlHdnPO6dlw Unsplash

“On verra bien ce que nous ferons à ce moment là. Pas certain que nous puissions mener à bien notre projet”. Depuis un mois, alors que le confinement est désormais bien installé et que le gouvernement nous a fait comprendre cette semaine que c’était parti pour durer cette maxime que nous entendons chaque jour est une antienne permanente. Notre humanité qui se veut avant tout progressive n’a plus rien à penser ni à prévoir. Demain, ce sera comme hier, comme aujourd’hui et comme après-demain. Le but : survivre et faire en sorte que les soignants aient de moins en moins de cas à traiter pour pouvoir – doucement – nous amener vers la fin de cette parenthèse angoissante et pesante. Peut-être pour la première fois de son histoire l’humanité n’a donc plus d’horizon… Certainement que même pendant les conflits mondiaux et notamment le second les résistants avaient plus de perspectives puisque malgré le danger, malgré la mort omniprésente, ils préparaient l’après. Ils rêvaient le monde qu’ils voulaient voir advenir de leur sacrifice.

En ce moment, de nombreuses initiatives nous invitent à penser le monde d’après. Les experts en tous genres nous expliquent que, décidément, après ne sera pas pareil. D’autres experts – tout aussi sûr d’eux – nous serinent que cette crise n’est pas une remise en cause du modèle et que de toutes façons nous repartiront comme avant, car cela est dans l’ADN de notre humanité et de notre monde actuel. Finalement, les uns et les autres s’agitent depuis leur salon en télétravail pour dire ce qu’il adviendra sans rien en savoir. Surtout, ils ne proposent pas un horizon puisque les uns expliquent que rien ne sera pareil sans dire exactement en quoi, les autres que tout repartira. Chacun conviendra que cela ne peut pas passer, non plus, pour un horizon. Et si au fond cette période dans toute la difficulté qu’elle revêt nous invitait, voire nous obligeait, simplement à vivre au présent.

Profitons, simplement. “L’après” attendra

A profiter de l’essentiel. Des nôtres, de nos proches, du temps qui est là et que l’on tente de combler par une agitation frénétique en conf-call. Et si en se refusant à profiter nous étions profondément toutes et tous en train d’emprunter une mauvaise route ?
Pourquoi, au contraire, ne profitons nous pas de ce moment pour vivre ici et maintenant. Pour cultiver au présent les rêves que nous avions hier, pour les faire advenir. C’est peut-être justement en profitant de ce confinement pour réaliser nos rêves d’hier que nous ferons advenir un “après différent”.

“La vraie générosité envers l’avenir consiste à tout donner au présent”, nous rappelle d’ailleurs Albert Camus. Alors certes, le présent est confiné. Cela ne nous empêche pas de tout donner à ce moment. De s’y investir pleinement. Totalement. Seul d’abord. Pour en faire jaillir le résultat – demain – sur le collectif. Seul ensemble aurait joué Chet Baker. “Alone together”. Au présent. Tous ensemble, demain. Pour changer.

Bon dimanche confiné.

L’éditorial paraît chaque dimanche matin dans l’Ernestine notre lettre inspirante (inscrivez-vous c’est gratuit), puis le lundi qui suit sur le site.

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