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Ernest, toujours Ernest

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Un roman sur Ernest. Non pas votre médias préféré (quoique), mais sur celui qui lui a inspiré son nom : Ernest Hemingway. Non pas un essai, un roman. Un vrai. Dans Il ne rêvait plus que de paysages et de lions au bord de la mer, Gérard de Cortanze offre un portrait saisissant des derniers jours d’Ernest Hemingway, un homme à la croisée des chemins, à la fois géant de la littérature et être humain broyé par ses propres doutes. Ce roman, publié chez Albin Michel, transcende la simple biographie romancée pour devenir une méditation vibrante sur les défis de la création et les blessures du temps.

L’ouverture du roman nous transporte à la Finca Vigía, près de La Havane, où Hemingway, accablé par la maladie et par une page qui refuse de se remplir, s’accroche aux derniers éclats de ses rêves. Mais ce n’est pas qu’un écrivain diminué que Gérard de Cortanze met en scène : c’est un homme hanté par la grandeur de ce qu’il a accompli et la terreur de ne plus pouvoir le reproduire. Hemingway est ici présenté non pas comme une légende, mais comme une âme à vif, en lutte contre la tyrannie de sa propre mémoire et la désintégration de son corps.

De Cortanze réussit un tour de force en reconstituant les pensées fragmentées et les souvenirs vacillants de l’auteur de Pour qui sonne le glas. Le lecteur est plongé dans un flux intime, où l’écriture se fait tour à tour acérée, douce, mélancolique, et où la frontière entre réalité et rêve se brouille à mesure que Hemingway s’égare. On ressent avec intensité la pression des séances d’électrochocs, les regards intrusifs du FBI, et l’étreinte de la solitude, ces fardeaux qui alourdissent chaque page et chaque souffle du grand écrivain.

Un roman qui respire et émeut

La force romanesque du livre réside également dans le traitement des relations humaines. Hemingway, cet homme souvent perçu comme brutal et distant, se dévoile ici fragile face à Mary Welsh, son ultime pilier. Leur relation, décrite avec une justesse rare, oscille entre une tendre complicité et une incompréhension poignante. Gérard de Cortanze ne juge jamais ses personnages, mais les montre dans toute leur complexité, avec un respect et une empathie admirables.

Ce roman brille par sa langue : poétique sans être ampoulée, précise mais jamais froide. Gérard de Cortanze a su capter l’essence d’Hemingway, non pas en imitant son style, mais en explorant ce que la figure de l’écrivain raconte de la condition humaine. Il ne rêvait plus que de paysages et de lions au bord de la mer est un hommage à un homme brisé mais indomptable, à une littérature qui sauve autant qu’elle consume, et à ce moment où tout écrivain, face à la page blanche, se demande s’il peut encore être digne de ses propres rêves. Gérard de Cortanze signe un superbe roman sur les derniers jours d’Hemingway. Un livre sur l’amour, la création, et les traces de la vie.

C’est un roman qui ne se contente pas de raconter : il vit, il respire, il émeut. Et c’est sans aucun doute l’un des grands textes littéraires de cette rentrée. Gérard de Cortanze nous offre ici une œuvre magistrale, à lire absolument. Avant de replonger dans certains livres de Papa Hem’.

“Il ne rêvait plus que de paysages et de lions au bord de la mer”, Gérard De Cortanze, Albin Michel

Tous les livres du vendredi d’Ernest sont là.

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