Soufflé, charmé, heureux et assoiffé de connaissances. Autant de sentiments qui accompagnent le lecteur ou la lectrice heureux qui comme Ulysse a voyagé dans le Florence de la Renaissance avec Vasari, Michel-Ange, Cosimo de Médicis, Catherine de Médicis, Strozzi, Bronzino et tant d’autres. Ce sont les personnages du nouveau roman vertigineux et tout simplement génial de Laurent Binet “Perspective (S)” chez Grasset. L’intrigue se noue autour du décès du peintre Pontormo, assassiné dans son atelier. Cosimo de Médicis confie l’enquête à Giorgio Vasari et tout le monde est suspect. L’intrigue se passe à Florence en 1557. Catherine de Médicis, reine de France, aimerait prendre le contrôle de la ville. Cosimo, lui, souhaiterait se départir de la tutelle de la France. Le livre, roman policier épistolaire, s’amuse à ausculter l’époque, à en restituer les beautés et les limites. Dans les lettres que s’échangent les différents personnages, il y a la volonté de pouvoir, des réflexions sur l’art, le désir, la beauté et même les soubassements sociaux de la société florentine de l’époque. Il y a aussi l’intégrisme religieux des savonarolistes sur le retour qui veulent prendre le contrôle des arts et des esprits. Résonance puissante avec aujourd’hui.
Un bonheur absolu de lecture
Le lecteur tourne les pages avec cette sensation folle d’être à chaque instant un peu plus bluffé par la virtuosité de l’écriture, par l’audace du procédé, par la profondeur du propos et par l’espièglerie de l’auteur. “Perspective (S)” est un roman joyeux, virevoltant, drôle, intelligent, plein de rythme et simplement talentueux. Laurent Binet démontre une nouvelle fois après “Hhhh“, “La septième fonction du langage“, ou encore “Civilizations” dont nous vous parlions ici, qu’il est un très grand écrivain. Ce roman est à mettre entre toutes les mains, à lire et à faire lire tellement il représente la quintessence de ce qui fait les grands livres : une idée, un style, une légèreté profonde, une profondeur légère, et immense bonheur de lecture. Il est souvent arrivé à Ernest de prédire ou de conseiller les jurés du Prix Goncourt. Ils seraient plus que bien inspirés que de d’ouvrir leurs perspectives et de donner la récompense à Laurent Binet pour ce roman magistral !
“Perspective (S)”, Laurent Binet, Grasset
