Cabinets ministériels ou services de renseignement, deux thrillers français, l’un de Vincent Crouzet, l’autre de Frédéric Potier se plongent dans les coulisses d’appareils de l’État très discrets par nature.
La fiction aide à construire un imaginaire positif autour des espions, nous expliquait Victor K à la sortie de « Cible Sierra », premier volet de sa série « Service Action ». Le romancier, lui-même ancien de la DGSE, se refuse à laisser les James Bond, Jack Ryan et autre Jason Bourne nous donner une vision strictement anglo-saxonne de ce monde clandestin. Après le très remarqué « Sauvez Zelenski » en juin dernier, en prise directe avec la résistance de l’Ukraine à l’invasion russe, il poursuit son œuvre de divertissement prosélyte avec « Louve Alpha », projetant cette fois les agents français du « SA » dans la lutte contre les mercenaires du groupe Wagner. L’actualité brûlante du sujet fait le sel de cet exercice d’équilibre entre réalité et fiction, nourri d’une expérience de la maison, de son jargon et de ses pratiques, qui ravira les amateurs du genre, initiés ou non.
Des intrigues au cordeau
Frédéric Potier s’appuie lui aussi sur son parcours passé pour projeter une intrigue née de son imagination, mais très plausible, dans des lieux de pouvoir bien réels, mais réputés inaccessibles. Cet ex-préfet, ex-conseiller à Matignon et à l’Assemblée nationale (par ailleurs chroniqueur pour Ernest), s’aventure là où se mêlent les eaux tumultueuses du pouvoir exécutif et du complexe militaro-industriel. Sous la même présidente de la République que dans son précédent livre, « La Menace 732 », il décrit l’onde de choc qui se propage jusqu’au sommet de l’État français après un attentat contre une usine d’armement. Au fil de cette intrigue politico-policière , l’auteur démontre la nature schizophrène d’un pays attaché à se faire entendre et respecter quand la totalité de ses forces armées pourraient tenir dans le Stade de France. Un roman haletant, un polar féministe où l’héroïne Nina Mériem assume ses choix, ses failles et ses forces. Un deuxième opus qui peut être lu indépendamment du premier mais qui forme un diptyque superbe plongeant le lecteur dans les coulisses du pouvoir.
« Service Action. Louve Alpha », Vincent Crouzet, Robert Laffont, 306 pages, 21,90€ (25 mai)
« La poésie du marchand d’armes », Frédéric Potier, L’Aube, 352 pages, 19,90€ (9 juin)
Photo de Une : crédit DM.