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Les cons ça ose tout

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“Il y a des claques qui se perdent” dit un adage populaire. Cette semaine l’auteur de ces lignes s’est répété cette expression plusieurs fois tant ce qui a déclenché cette ritournelle lui a paru tellement immonde que cela n’est plus sorti de son esprit. Cher lecteur et cher lectrice du fond du lit, désolé d’avance si l’événement en question produit le même effet chez vous.
C’est donc la vue d’une photo, celle que vous voyez dans cette Ernestine, qui a suscité dégoût, colère et incompréhension. On y voit donc des touristes imbéciles se prendre en photo dans des poses suggestives devant l’entrée d’Auschwitz-Birkenau. Oui, vous avez bien lu. Oui vous avez bien vu. Des débiles sont allés visiter Auschwitz et se sont pris en photo devant pour poster le cliché sur les réseaux sociaux.

Rien que le fait de tracer ici cette phrase procure un sentiment de colère tel qu’il serait possible de cracher à la figure de ces ignares si d’aventure leur route croisait la nôtre. Se demander ce qui peut bien passer dans la tête de ces imbéciles pour faire cela. Se rappeler de son propre voyage mémoriel sur ces lieux. Se souvenir d’être pétrifié et tétanisé par le poids plus qu’immense de l’histoire. Se souvenir d’être presque anesthésié par le silence des frères et sœurs en humanité disparus là-bas. Se replonger dans cette visite, se souvenir des livres lus, des films vus, des témoignages entendus, et ne pas comprendre comment il puisse être possible de faire ce que ces touristes ont fait.

Comme s’ils avaient profané un cimetière entier. Comme s’ils criaient que tout cela n’était qu’un spectacle de plus dans notre société où tout est image et où tout est devenu un jeu narcissique.

Coïncidence des temps, cette photo surgit alors que cette semaine se déroulait la commémoration des 80 ans du soulèvement du Ghetto de Varsovie. “Il y a des claques qui se perdent.”  Ritournelle toujours présente alors que la pornographie même de l’attitude de ces idiots ne parvient pas à s’estomper. Avoir tout de même envie de leur prescrire une fieffée punition qui est en fait une offrande tant leur cerveau est carbonisé par le miroir narcissique de leur téléphone portable.

D’abord leur faire lire “Si c’est un homme” de Primo Levi qui leur passera certainement l’envie de se pavaner à Auschwitz. “Ici il n’y a pas de pourquoi”, écrivait l’auteur italien. Puis leur maître entre les mains, “L’univers concentrationnaire” de David Rousset ou encore “La nuit” d’Elie Wiesel. Les faire regarder “To be or not to be” de Lubitsch pour leur apprendre ce qu’est la finesse d’esprit, ou encore “Ombre et Brouillard” de Renais. Pour leur apprendre. Pour leur raconter ce sur quoi ils sont en train de cracher.

Se demander si cela servirait vraiment à quelque chose et s’ils ne sont pas définitivement perdus ? Se dire que le devoir de mémoire est peut-être encore plus important aujourd’hui qu’hier. En revanche, ce qui ne change pas et qui reste une constante historique, est la façon de reconnaître les cons : ils osent tout.

Bon dimanche,

Photo partagée sur Instagram par l’autrice et réalisatrice Emilie Frêche pour alerter sur l’attitude de ces honteux énergumènes.

édito paraît le dimanche dans l’Ernestine, notre lettre inspirante (inscrivez-vous c’est gratuit) et le lundi sur le site (abonnez-vous pour soutenir notre démarche)
 
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