“La vie c’est comme une boîte de chocolats, on ne sait jamais sur quoi on tombe”, dit le personnage de Forrest Gump incarné par Tom Hanks dans le film éponyme. Rico, l’anti-héros sympathique du dernier roman d’Hugues Serraf “La vie, au fond” (nous avions beaucoup aimé son précédent “Le dernier juif de France”, nous vous en parlions ici ), lui semble avoir tiré quelques mauvais chocolats tant il semble désabusé et pris de court par une époque qui le dépasse et le laisse pantois. “Et il ne faut pas le stimuler beaucoup pour qu’il déroule sa nostalgie d’un Marseille fernandélo-guéguianesque, avec une pincée de borsalinisme toutefois -ne serait-ce que pour son goût pour la geste mafiosique.” Nostalgique un jour, nostalgique toujours. Rico c’est un “sans dent”, un type qui est paumé et qui ne sait plus vraiment se mouvoir dans une société qui ne semble pas vouloir de lui. Alors il se débrouille. Il vend du shit à la sauvette et se débrouille comme il peut tout en écoutant France culture.
Un roman humaniste
Dans ce portrait doux amer de l’époque, Serraf imagine aussi un personnage attachant qui est à la fois rigolo et philosophe qui interroge avec humour la vie qui passe, les remords et les regrets, le déclassement et la pauvreté. Au fond, ce roman est un roman sur la France d’en bas ou la France périphérique qui ne se sent plus faire partie du monde. Avec l’acuité du romancier, Serraf la peint. Sans jugement. Avec empathie et douceur. On sourit autant que l’on est ému par les pérégrinations de Rico. Serraf raconte avec un talent qui se confirme à chaque roman ce monde où la réussite se mesure à la marque des baskets que l’on porte ou à la taille de sa voiture. Comme si le reste ne comptait pas. “La vie, au fond”, est un roman humaniste. Un roman qui interpelle. Un roman qui dit le monde. Pour faire vivre au lecteur l’expérience sensible de décentrement qui sied à tout objet littéraire.
“La vie, au fond”, Hugues Serraf, éditions Intervalles, 17 euros.
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