Patrick Bateman. Vous connaissez peut-être ce nom. C’est celui du personnage d’American Psycho, le roman de Bret Easton Ellis. Dans ce livre, Bateman incarne un yuppie qui porte des costumes de marque, est riche, accro au sexe, et consommateur de drogues à gogo. Surtout Bateman est l’archétype du vide de la pensée. Vide qu’il comble en devenant un criminel psychopathe et psychotique assez effrayant. A ce stade, peut-être vous demandez-vous le sens de cette introduction. Patience, lecteur, il arrive…
Cette semaine, une nouvelle fois, notre monde médiatique sous perfusion des réseaux sociaux nous a livré un spectacle d’une immense qualité. Ainsi, nous avons pu assister aux élucubrations pathétiques d’une chroniqueuse sur LCI. Laquelle expliquant que lorsque l’on gagne le SMIC c’est parce que l’on a mal travaillé à l’école et que du coup, une femme qui gagne le SMIC ne pouvait pas divorcer. Certainement que pour avoir une pensée aussi fulgurante cette demoiselle a, elle aussi, mal travaillé à l’école. Le pire, c’est que le présentateur de l’émission où la fulgurance a été déversée a cru bon de préciser que cela relevait de l’opinion.
Évidemment, la semaine a aussi charrié son lot de “zemmoureries” toujours plus lamentables les unes que les autres. Des “zemmoureries” toujours prononcées sur la chaîne de Vincent Bolloré, CNEWS. Il est important de s’en souvenir, pour plus tard, quand finalement la bête immonde sera revenue. Cerise sur le gâteau de la semaine du n’importe quoi, Yann Moix – criant symptôme de notre société malade – était l’invité de Cyril Hanouna, autre sympôme de nos sociétés insignifiantes.
Ils nous polluent l’esprit et occupent notre temps d’antenne
Et autant dire que quand deux philosophes de ce calibre sont sur le même plateau, Sartre, Camus et Nietzsche se retournent dans leurs tombes.
En attendant, ces marionnettes occupent du temps d’antenne de manière astronomique. En attendant, ces marionnettes déversent leur pensée nauséabonde faite d’ignorance crasse, de présupposés faux et d’arguments pour enfants de 6 ans. Comme Patrick Bateman, ces marionnettes sont des criminels. Ils viennent polluer nos chaînes de télévision, nos débats sur les réseaux sociaux, nos vies de leur haine et de leur ignorance.
Des criminels de la pensée, des Patrick Bateman de la pensée, confits dans leurs certitudes, incapables du moindre doute et de la moindre nuance. Nous sommes leurs victimes. Cela par la faute de médias complices, avides d’audience.
Pour terminer la semaine, un poème qui ne leur plaira pas, eux qui sont incapables de la moindre remise en question, persuadés d’être les détenteurs de la vérité suprême.
Ce vers de Yehuda Amichai est le suivant :
“Sur le lieu où nous avons raison, aucune fleur ne poussera au printemps”.
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