Ce mois-ci, Virginie Bégaudeau fleurit avec le printemps et nous livre une rubrique "petit cochon" d'une sensualité torride pour jouir avec les mots. Toujours avec sa plume langoureuse et acérée pour nous donner envie de plonger dans ces pages érotiques.
Histoire de petite fille - Sacha Sperling
« Je suis le rêve américain, du sperme plein la gueule. Je suis riche. Comme un rappeur. Comme un homme d’affaires. Le compte en banque de Donald Trump et la bouche de Donald Duck. »
Dans la banlieue de San Diego, il y a Mona, une adolescente de seize ans, entourée par la misère, l’ennui, la drogue et la prostitution. Et puis, il y a cette mère défaillante libidineuse et son nouveau mari obsédé par la sexualité précoce de la jeune fille sous son toit.
Je suis sa décadence sous le soleil de Paradise Hilt, entre son dealer de petit ami et son envie de liberté. Je sens que Mona étouffe entre ses excès de luxure, cette adulescente, finalement, qui n’a aucune notion de l’amour et qui crève d’avoir un « destin, n’importe lequel ». Jusqu’à la fugue vers Los Angeles, une teinture blonde et des lentilles bleues sur les yeux, un passeport dérobé dans la poche. Je l’accompagne, la prends par la main. Un instant, je suis cette cavaleuse avide de sexe et d’espoir. Mona rencontre ce producteur de films pornos qui lui offre une nouvelle identité, celle d’Holly, idole du web et prête à tout pour venger un début d’existence misérable. Je me glisse dans cette indécente prise de pouvoir, je suis un peu Holly la débauchée et Mona la jeune fille qui cherche les caresses.
Je suis un peu les spectateurs de ses œuvres, mariés abstinents, repoussants, bons partis, pour qui Holly est devenue leur érection presque quotidienne.
Ce roman de Sperling m’a secouée autant qu’il m’a fait vibrer, au travers une héroïne loin des codes du genre, une virée américaine cynique au goût de stupre. Sans concession, j’assiste, encourage surtout, Holly qui n’est pas la victime que l’auteur a pensé dessiner. Elle m’est livrée avec sa hargne, une copine de route, un modèle d’érotisme ? Les coups de fouets rythment un quotidien aussi biaisé que baisé. Je savoure la souffrance de la victoire au prix d’un corps abîmé. Et pourtant, je me sens protégée derrière ses pages où se mêlent hauts le cœur, fascination et excitation. Le texte épuré raconte une part de fantasme que j’ai eu, un jour, entre un couloir de lycée et un dimanche d’été.
Vous avez lu 25% de cet article...
Pour découvrir la suite, c'est très simple :