“Tu ne pourrais pas me conseiller un livre drôle ?“. Cette question revient souvent dans la bouche des amis ou des lecteurs d’Ernest par mail ou sur les réseaux sociaux. Souvent ma réponse est la même : Portnoy et son complexe de Philip Roth aux éditions Folio.
Ce livre met en scène le trentenaire Alexander Portnoy qui se confie à son psychanalyste. Tout y passe : l’enfance de ce garçon issu d’une famille juive immigrée, mais aussi l’apprentissage de la masturbation, l’éveil à la sexualité et les tribulations croquignolettes de cet Alexander qui aime le sexe et les femmes callipyges, mais qui se désole de leur manque de jugeote. Ce roman profondément drôle et subversif est un roman qui plonge le lecteur dans un plaisir de lecture certain. Ce Portnoy est de ces livres qui ne vieillissent pas. De ceux que l’on aime à 18 ans comme à 35 ans ou à 55 ans. Et qui nous font à chaque fois rire et sourire. A des endroits différents.
Portnoy est un livre fort et fragile. Un livre léger et profond. Un livre qui marque. Comme de nombreux autres livres de Philip Roth, d’ailleurs.
Quelques extraits :
Portnoy (complexe de) […] [d’après Alexander Portnoy (1933- ). Trouble caractérisé par un perpétuel conflit entre de vives pulsions d’ordre éthique et altruiste et d’irrésistibles exigences sexuelles, souvent de tendance perverse.
Elle était si profondément ancrée dans ma conscience que, durant ma première année d’école, je crois bien m’être imaginé que chacun de mes professeurs était ma mère déguisée.
Imaginez la chose : supposons que je me décide et que j’épouse A avec ses délicieux nichons et ainsi de suite, qu’arrivera-t-il lorsque B qui en possède d’encore plus délicieux –ou en tout cas de plus nouveaux- fera son apparition ? Ou C qui a une façon spéciale de remuer son cul dont je n’ai encore jamais fait l’expérience ; ou D, ou E, ou F. J’essaie d’être sincère vis-à-vis de vous, Docteur –parce qu’avec le sexe l’imagination humaine galope jusqu’à Z et ensuite au-delà !
Je vous en prie, pas de foutaises entre nous sur “l’amour” et sa durée. Et voilà pourquoi je demande : comment puis-je épouser une femme que “j’aime” sachant pertinemment que d’ici cinq, six ou sept ans je vais me retrouver dans les rues en quête d’une nouvelle chatte toute fraîche – et pendant ce temps là, ma fidèle moitié qui m’a créé un si charmant foyer,etc, supporte avec courage sa solitude et sa disgrâce ? Comment pourrais-je affronter ses terribles larmes ? Je ne pourrais pas. Comment pourrais-je affronter mes enfants qui m’adorent ? Et ensuite, le divorce, c’est bien ça ? L’entretien des enfants. La pension alimentaire. Les droits de visite. Merveilleuse perspective, vraiment merveilleuse.
Mardi 22 mai 2018, Philip Roth – alias Alexander Portnoy – est mort. C’est vraiment triste. Heureusement, il nous reste le complexe … Ciao Portnoy !