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Dans l’Amérique Cherokee

Marlon Josue F AZfONjuVw Unsplash

Dans son regard d'Amérique, Cécile Péronnet raconte l'Amérique Cherokee, l'une de celles que Trump déteste. Elle est au cœur d'un roman passionnant signé Brandon Hobson. Puissant.

Les Nations premières souffrent depuis longtemps, aux États-Unis comme ailleurs, porteuses d’un passé aussi lourd que sanglant, souvent ignorées voire maltraitées par les Présidents – Donald Trump ne fut pas le premier, loin de là. Comme un avertissement, Brandon Hobson, lui-même cherokee, fait ainsi de l’identité amérindienne le cœur de son récit choral, un véritable plaidoyer contre le racisme, quelle que soit sa cible.

Ses héros, les Echota, ont perdu Ray-Ray, le premier de leurs fils, quinze ans plus tôt, assassiné par un policier, une tragédie qui a évidemment laissé une empreinte douloureuse chez chacun et qui n’est pas sans rappeler George Floyd ou Franck Tyson [1], deux Noirs Américains morts sous le genou raciste d’un agent.

Maria Echota, la mère, fait bonne figure mais se réfugie dans ses carnets pour s’épancher, tandis qu’Ernest, son mari, laisse piteusement ses souvenirs s’effilocher, la confusion s’emparant de son esprit à cause de la maladie d’Alzheimer. La sœur aînée de Ray-Ray, Sonja, peine quant à elle à s’entourer de bienveillance, préférant la solitude ou l’agressivité d’hommes qu’elle choisit mal, et le petit frère, Edgar, a sombré dans l’addiction des années plus tôt, loin des siens.

Capture D’écran 2024 05 03 À 18.20.07L’alternance narrative entraîne le lecteur dans le quotidien du couple et des deux jeunes adultes, tandis que le racisme latent auquel ils font face en tant qu’Amérindiens se manifeste chaque jour – un éclat dans le regard d’un passant, le comportement ambivalent d’un amant, les projets absurdes de celui que l’on voyait comme un ami. De cette manière, l’auteur souligne la position précaire des Nations Premières dans l’Amérique d’aujourd’hui.

En effet, si Joe Biden se place du côté des Amérindiens qui l’ont aidé à gagner en 2020 – dans son programme, il promettait alors de « restaurer l’âme de la nation » comme le rappelait Native News Online en août 2023 [2] –, si de nombreux efforts ont été faits depuis son élection pour valoriser les différentes tribus qui ont précédé les pèlerins sur le sol américain, il tâche en premier lieu de réparer les erreurs de son prédécesseur. À l’opposé de l’échiquier politique, rappelons que Donald Trump n’a eu de cesse pendant son mandat de malmener les Amérindiens, suspendant des sommets présidentiels dédiés qui donnaient lieu à des concertations, réduisant le budget pour l’éducation et la santé dans les réserves, manquant à protéger leurs terres, leurs cimetières et nombre de leurs sites culturels [3]. Comme sur bien des sujets, la frange républicaine qui le soutient n’est pas revenue à la raison depuis 2020. Ainsi, Kristi Noem, gouverneuse du Dakota du Sud pressentie pour être la colistière de Trump en novembre prochain [4], a été bannie de plusieurs réserves amérindiennes en avril dernier après avoir affirmé à de multiples reprises que les cartels de drogue mexicains entretenaient des rapports privilégiés avec les terres amérindiennes, entre autres inepties. [5] Espérons que d’ici la fin de l’année, Joe Biden ait le temps de continuer à honorer ses engagements. Il a déjà signé un décret en décembre 2023 pour promouvoir et soutenir l’auto-détermination des Nations premières, promettant de nombreuses dépenses de l’exécutif dans ce sens [6], lesquelles ont déjà commencé à être effectuées.