Ses six mois de mission en Afghanistan avaient déjà inspiré à Jean Michelin l’impeccable « Jonquille », récit qui sondait la routine d’une opération extérieure de l’armée française pour en exhumer un paquet de frustrations et de traumatismes. Promu depuis au grade de lieutenant-colonel, ce féru de littérature et de rock poursuit son introspection avec une fiction aux accents de roman noir. « Ceux qui restent », ce sont quatre hommes soudés par la perte d’un camarade dans une embuscade, sur un théâtre de conflit lointain, et qui en recherchent un cinquième disparu soudainement, peut-être hanté par la tragédie passée.
Sous le regard infaillible des femmes
Dans leur ville de garnison un peu trop calme, ils ont renoué avec des existences sans relief, doucement désenchantées. Mais un retour de mission ne se nourrit pas que de décompression, la vie ordinaire d’un soldat ne l’est jamais vraiment. La quête du copain sous-off en fuite fait remonter une douloureuse vérité trop vite enfouie : quand on a vu la mort de près, on ne s’y habitue pas. Le regard infaillible des femmes, épouses ou compagnes, les renvoie à leurs dérobades et à leurs blessures cachées. Au fil des flashbacks se révèlent les traits les plus sensibles de la micro-société militaire mais aussi les plus laids. Débordant de sincérité, piétinant crânement les idées reçues, ce premier roman en appelle d’autres.
« Ceux qui restent », Jean Michelin, éditions Héloïse d’Ormesson, 240 pages, 19€
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