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La chatte sur un toit brûlant

Diana Parkhouse 0p0lVOLdVmg Unsplash

Un spectre hante la France : le chat.
Oui, oui, vous avez bien lu, vous êtes bien réveillés. Le spectre félin hante la France.
Rassurez-vous tout de suite les amis, il n’est pas question ici de s’élever contre les lolcats et la passion féline qui peut habiter chacun et chacune (quoique…) d’entre nous. Non ce matin de dimanche pascal, il est plutôt question de s’insurger contre la philosophie du chat qui semble avoir gagné les esprits les plus éclairés.
La philosophie du chat ? Kezako ?

C’est très simple. La philosophie du chat correspond, en tous points à la fatigue généralisée des occidentaux et a fortiori des Français qui plongés dans leur civilisation du cocon sont tentés – tels les chats – de ronronner gentiment sans se préoccuper réellement de ce qui se passe aux alentours, voire même en s’en éloignant le plus possible pour ne plus rien voir, ni ne rien entendre et pouvoir ainsi tranquillement ronronner. Dans cette civilisation du cocon, ce qui importe c’est le petit confort personnel plutôt que le devenir collectif.

“Le brouillard approche à petit pas de chat” écrivait le poète suédois Carl Sandburg. Prémonitoire ? Peut-être bien… Brouillard épais d’une civilisation du cocon où il se trouve des gens pour râler d’avoir attendus dix minutes dans un bureau de vote pour voter, où l’on pense que le pire n’est pas possible et qu’ainsi, partir à la pêche avec son chat, est une excellente idée, et où l’on croit qu’un être change profondément justement parce qu’il se met à parler et à cajoler des chats.

Le ronronnement des chats, chacun le sait, s’il charrie avec lui une sensation profonde de bien être est profondément traitre. Il conduit à baisser la garde, à être moins vigilant et à se laisser doucement endormir. “Le brouillard approche à petits pas de chat”.

Le brouillard est déjà là et maintenant il menace de se transformer en Rê, dieu solaire de l’ancienne Égypte, qui parfois se manifestait sous la forme d’un chat féroce pour tuer d’un seul coup de patte fatal.
Alors il est question de pureté, de gêne aux entournures, et donc de ronronnement. Comme si les Hugo et Hoederer des “mains sales” sartriennes s’affrontaient encore et toujours. Mettre les mains dans la merde, jusqu’au coude ou garder les mains pures. Philosophie du chat, encore…
Se perdre dans les méandres des possibilités. Se révolter. Se résigner à la peur. Se demander quoi faire. Se souvenir de Tennessee Williams et de cette “chatte sur un toit brûlant” décrivant si bien les moments charnières d’une famille à la dérive. Se demander si notre famille commune, La France, n’était justement pas sous la menace de cette fatigue généralisée, de cette explosion similaire à celle qui gagne les personnages de la pièce (et du film inspiré de) de Tennessee Williams. Se souvenir aussi d’Hemingway. Pour qui sonne le glas. “La mort de tout homme me diminue parce que j’appartiens au genre humain ; aussi n’envoie jamais demander pour qui sonne le glas : c’est pour toi qu’il sonne“, rappelle le poète John Doone dans son “Aucun homme n’est une île”.   
Le chat a fait sonner le glas. A chacun et chacune de se rappeler qu’il sonne pour tous. Et qu’il peut aussi ne plus jamais sonner.

Bon dimanche,

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