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Les passeurs d’histoires

Feu Follet 19

Il y a quelques semaines, la vie nous a mené sur la piste des livres anciens. Des livres rares, des éditions originales et autres joyeusetés. Alors que nous ne nous pensions pas capables de devenir "bibliophiles", la joie, la passion et l'intelligence de l'équipe de la Librairie Le Feu Follet nous ont convertis. Reportage chez les passeurs d'histoire. (Bientôt un événement Ernest aura lieu dans les locaux de la librairie. Pour être informés, inscrivez-vous à notre newsletter du dimanche).

Photos Patrice NORMAND

Feu Follet 11Les quatre petits livres reliés sont posés sur la tranche. Deux libraires, Sybille Pandolfi et Grégory Bacou s’affairent sur la notice des ouvrages, ils discutent sur l’information clé qu’il faut mettre en avant. Il se délectent, aussi, des pages de leur dernière acquisition au titre évocateur : « Le panorama des boudoirs ». Alors que Grégory lance ce titre d’une voix joyeuse et que nos yeux ont dû l’amuser, il embraye : « Ce n’est pas du tout ce que vous croyez ! En fait ces quatre petits volumes ont tout pour sembler faire partie de la littérature érotique début du 19e siècle alors qu’ils sont beaucoup plus intéressants que cela pour raconter la société de l’époque. Ces quatre ouvrages ont en fait été écrits par une femme et loin d’être des érotiques, ils sont une lecture à la fois subversive et politique et instruisent sur la façon dont les femmes ont pu être rayées de l’histoire, même littéraire ». L’autre intérêt de ces quatre petits ouvrages, c’est « de montrer comment le discours féministe a été mis sous le boisseau par l’histoire », mais aussi de « plonger dans les mœurs, les pudeurs et les emballements de l'époque.»

La passion de Grégory est totale. Communicative même. En entrant dans la librairie Feu Follet 16« Le Feu Follet » dans le 5e arrondissement de Paris, il est possible d’être impressionné. De se dire que l’on n’est pas forcément à sa place. Que l’on n’est peut-être pas à la hauteur de tous ces livres reliés qui nous contemplent. Et puis, doucement, l’ambiance gagne le visiteur. Cette ambiance faite de sensualité dans l’amour du livre, non pas objet, mais dans l’histoire qu’il raconte, mais aussi de transmission, puisque tous les libraires savent mettre à l’aise celui ou celle qui vient là pour la première fois ou pour la dixième. « Notre rôle est d’être des passeurs. Nous ne sommes pas prescripteurs, nous travaillons comme des archéologues. Nous prenons des livres qui pour différentes raisons sont historiquement importants pour ensuite les transmettre à des bibliophiles », détaille Grégory. Une question taraude alors le visiteur : faut-il être riche pour accéder à ces trésors ? « Pas nécessairement. Il est possible de commencer une collection avec 15 euros. Le tout est de savoir ce que l’on choisit et comment on le choisit », confie le libraire.