Entouré d’albums de bande dessinés, de livres brochés et de dos carrés collés, Corbeyran présente les livres qu’il aime offrir. Sa façon de faire découvrir la bande dessinée. Cet auteur prolifique évoque le monde du vin, Frédéric Beigbeder et Rahan. Rencontre.
“Comme mes deux passions sont le vin et la bande dessinée, j’offre toujours le premier tome de Château Bordeaux (Glénat, dessins Espé) assorti d’une bouteille de vin. J’ai un peu l’attitude du dealer. Château Bordeaux compte une série de 12 volumes, donc j’offre le premier. A charge ensuite aux personnes de compléter la collection. Plus sérieusement, l’idée est de déclencher une curiosité sur le monde du vin. La série aborde le monde du vin sous la forme d’une saga familiale et d’un polar. C’est un univers très complexe. Il est très simple de se servir un verre de vin alors qu’il est plus compliqué de comprendre comment cela fonctionne et comment le vin est fabriqué. J’ai aussi découvert que, plus on en sait, plus le goût s’affine. En l’offrant, je souhaite ouvrir une petite fenêtre sur ce monde.
Je me souviens très précisément de qui m’a fait découvrir tel ou tel auteur. Cela me semble important car cela en dit long sur la personne qui t’offre un livre et sur le regard qu’elle porte sur toi. Cette personne pense que tu vas aimer. Je suis un lecteur assez éclectique. Je me souviens d’Olivier Balez, dessinateur avec qui j’ai réalisé deux bandes dessinées chez Dargaud dont Charmes fous. Cet album mettait en scène un publicitaire. Olivier était peu connu à l’époque, il voulait s’inspirer de Frédéric Beigbeder. Ce dernier n’était pas très connu non plus à ce moment-là. Il était un trublion. Il faisait beaucoup parler de lui en boites de nuit. Il venait de publier 99 francs (Grasset). Olivier me l’avait offert. Il trouvait le personnage intéressant y compris physiquement avec son menton en galoche. J’ai adoré ce bouquin. J’ai pleuré de rire et un peu de désespoir. Depuis, j’ai tout lu de Frédéric Beigbeder grâce à un projet BD dans lequel le personnage était publicitaire, de moindre envergure que Frédéric, certes. Nous lui avions demandé une préface qu’il a gentiment accepté de rédiger. Et aujourd’hui, il est devenu la star que l’on connait.
“Rahan m’a donné envie de faire de la BD”
Rahan (Soleil) m’a donné envie de faire de la BD. Quand j’étais petit, avec Iznogoud, c’était ma BD préférée bien plus que Tintin, Astérix ou Lucky Luke. J’étais déjà très fasciné par le trait réaliste de cette remise en scène d’une période que personne n’a vécu. La préhistoire est une période fantastique ré-inventée par Roger Lécureux et André Chéret. J’étais fasciné quand j’étais petit. Grâce à Pif Gadget, j’avais le collier de Rahan ainsi que son coutelas d’ivoire… en plastique. Je jouais beaucoup à Rahan et me suis beaucoup identifié à ce personnage. A partir de là, la BD trottait dans ma tête. Quand je suis devenu professionnel, lors de mon premier festival, à Hyères. Je m’en rappelle comme si c’était… à Hyères. C’est donc à Hyères que j’ai rencontré pour la première fois André Chéret. Puis nous sommes devenus amis. Il fait partie de mes monuments personnels.
Cet aspect personnel et affectif est essentiel. Par exemple, mes retrouvailles avec Jeff, le dessinateur, sont très importants avec No future (Delcourt). Cet album présente deux personnages typés des années 80 dans un monde ultra. Ils ont les mêmes travers que dans cette période dans un univers très sécurisé et très interdit. C’est une vraie BD d’action dont le sujet reste très humain. Nous avions, avec Jeff, l’envie d’offrir deux personnages iconiques.”
No future (Delcourt, dessins Jeff). Delcourt. Photo de Une : Jean-Bernard Nadeau