7 min

Olivier Mak~Bouchard : «J’ai toujours trouvé le réel un peu morne »

Cover Crop

Après Le Dit du Mistral, un premier livre très remarqué et apprécié (prix Première Plume 2020, Prix des Rencontres à Lire de Dax 2020, Prix du Livre Cogedim Club 2021), Olivier Mak~Bouchard revient avec un nouveau roman surprenant : Le temps des Grêlons, fable connectée à notre époque, depuis les hauteurs du Luberon ou du Plateau d’Albion. Pleins de surprises, ce nouveau récit qui lorgne du côté de l’anticipation tout en conservant cet ancrage régional qui avait fasciné les lecteurs dans le Le Dit du Mistral, se penche sur une bande de gamins qui vont grandir dans un monde où les appareils photo et les caméras n’enregistrent plus la présence humaine. Ou plutôt si, l’enregistrent, mais ne la diffusent plus, créant des avatars des personnes capturées par l’objectif, qui reviennent sur Terre : les Grêlons. Imaginez-vous croiser Arthur Rimbaud en Provence ou Hitler à Paris... Ces événements incongrus s’enchaînent avant que le monde ne prenne conscience qu’il va falloir gérer ces "réfugiés temporels" qui deviennent de plus en plus nombreux tandis que la technologie démocratise la photo. Raconté à hauteur d’enfant, le roman suit le parcours de 3 jeunes amis qui vont vivre différemment le délicat passage à l’âge adulte à l’heure où le fascisme sourdre, où les réseaux sociaux se font toujours plus intrusifs et où la poésie apparaît comme un dernier îlot de résistance à la bêtise.

Désireux d'en savoir plus sur  l'univers si original de ses ouvrages, nous vous proposons un entretien exclusif avec l’auteur, qui vit aujourd’hui à San Francisco.

Photos : Crédits Olivier Mak-Bouchard - éditions Le Tripode 

 

Le Temps Des GrelonsDans vos deux romans, l'intrigue est liée à l’orage : celui qui dévoile la source dans Le Dit du Mistral, et celui, plus symbolique, qui lâche les Grêlons dans votre nouvel ouvrage. La nature occupe-t-elle une place à part chez vous ? Ou doit-on y voir une métaphore du changement ?

Olivier Mak~Bouchard : Bien vu, je n’y avais pas pensé ! Dans Le Dit du Mistral, oui, c’est la nature, le destin, les dieux qui décident de se rappeler à nous. Peut-être pour faire ressurgir un certain passé injustement oublié. Dans Le temps des Grêlons, c’est toujours la nature, la planète, mais plutôt dans une dimension physique, qui nous dit stop, et par là même de faire attention à ce que nous sommes en train de faire. Dans les deux cas, l’orage intervient pour mettre fin à une situation dont tout le monde s’accommode, mais qui cloche sous certains angles.

Le temps des Grêlons a des accents SF, mais il y a une forte incursion du réel avec la montée du fascisme en France à l’aube de l' élection présidentielle de 2022, ou le côté "auto flicage » des réseaux sociaux. Était-ce une envie d’ancrer le livre dans notre époque ?

Olivier Mak~Bouchard : Je parlerai plutôt d'anticipation. Ou de réalisme magique. Mon idée, dans ce livre, était d’aborder des sujets sérieux, assez lourds, mais en évitant si possible les discours surannés, le côté donneur de leçons qui est pas mal rabâché. J’ai donc imaginé de voir le monde à travers les yeux d’un enfant qui décrit de manière très simple des évènements très compliqués.

Les deux livres sont portés par des narrateurs assez naïfs, assez jeunes, surtout dans Le temps des Grêlons. C'est une manière de rendre le quotidien plus merveilleux ? De grandir avec le narrateur ?

Olivier Mak~Bouchard : Cet enfant se heurte à la violence des adultes et refuse de grandir. Sa naïveté, la simplicité de son style d’expression surprend au début, mais au fil des pages, le lecteur voit sous un prisme différent des choses qu’il ne connaît que trop bien et auxquelles il s’est habitué au fur et à mesure des actualités. Les redécouvrir par les yeux d’un enfant en fait ressortir le caractère éberluant.

Du coup, ce sont ces thématiques qui ont guidé la construction de votre livre ou ont-elles fait incursion dans la fable ?