Stop ! Attention, ce roman est très puissant. De la force de l’adolescence. De la fougue de la jeunesse. De sa rébellion. De ses envies débordantes. De ses premières désillusions, aussi. Heloïse Guay de Bellissen est une autrice redoutable. Lors de son entrée en littérature avec le “roman de Boddah” elle faisait parler “Boddah”, une peluche double de Kurt Cobain et nous narrait ainsi la vie du leader de Nirvana et nous parlait de l’adolescence et de ses tourments. C’était beau et touchant. (Nous vous en parlions, ici). Depuis, elle a écrit cinq livres tous originaux et interpellant. En 2020, elle a publié le “dernier inventeur” consacré à Simon Coencas, dernier survivant du quatuor d’adolescents qui a découvert la grotte de Lascaux. Elle revient cette année avec un roman polyphonique, fort, ciselé et qui prend aux tripes. Il a paru chez Seghers à la rentrée et n’a pas (encore mais nous comptons sur les lectrices et les lecteurs d’Ernest) le succès qu’il mérite. Le titre : “Crions, c’est le jour du fracas”. Le pitch est simple : c’est un jeu de miroir entre l’autrice adolescente dans les années 90, qui zone un peu, fait des bêtises de son âge, s’interroge sur son avenir, écoute de la musique et se réunit avec les autres membres du groupe de la “Table”, et l’histoire vraie du dernier bagne pour enfant sis sur l’Ile du Levant. Nous sommes en 1866, dans une colonie pénitentiaire pour mineurs, sur l’île du Levant, en face de Hyères, une révolte se termine par la mort de 13 enfants lors d’un incendie.
Force romanesque, force de l’adolescence
Entremêlant ces deux histoires avec une force romanesque certaine et une écriture ciselée qui prend aux tripes, Guay de Bellissen interroge sur les chemins escarpés de l’adolescence, sur nos envies de rébellion qui parfois peuvent mal se terminer. Surtout, l’autrice pose un regard tendre, affectueux, doux et beau sur ce qu’être ado veut dire. Sur les doutes, les joies, mais aussi et principalement sur la quête d’absolu de cette période de la vie. Sur notre besoin de vivre les choses non pas à 100 % mais à 150 % pour se sentir vivant. Pleinement vivant. Tout cela est raconté avec intelligence et finesse dans cette construction romanesque puissante qui ne laisse pas une minute de répit au lecteur pris dans la montée inexorable vers le drame, mais aussi vers une forme de beauté. Lisez ce roman, vous ne le regretterez pas. Criez, jeunesse !
“Crions, c’est le jour du fracas”, éditions Seghers, Heloïse Guay de Bellissen.
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