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Additions collectives

Tony Hand C9Ni6Gh GWk Unsplash

Nous sommes le 12 septembre. 12 qui s’insère entre le 11 et le 13. 11 septembre, 20 ans. 13 novembre, presque six ans et un procès qui s’ouvre pour les auteurs des attentats de Paris. Nous pourrions, ce matin, rappeler à quel point ces deux dates et la conjonction des 20 ans du 11 septembre avec l’ouverture du procès influent sur nos quotidiens. Personnels comme collectifs. Nous pourrions, aussi, rappeler aux imbéciles qui nous serinent que nous sommes en « dictature » qu’un procès démocratique et contradictoire va justement permettre de respecter les droits des barbares qui ont tué aux terrasses, au concert, et aux abords d’un stade. Nous pourrions, également, disserter longuement sur ce qu’il nous faut sauver et réinventer.

Ce matin, nous avions envie d’autre chose. 12 c’est aussi 2+1 qui font, comme chacun sait, 3. Chiffre 3 qui vient nous rappeler l’importance du collectif. De l’addition. Même dans sa graphie ronde, le 3 emmène l’esprit vers le ballon, le verre, les rondeurs affriolantes etc… Comme pour nous dire et nous signifier que le collectif est une force. Plusieurs résonances cette semaine avec cette idée. D’abord une voix. Énergique, un matin sur France Inter.  « Nous sommes en panne de récit collectif. J’ai 30 ans et j’ai toujours entendu parler du récit de la crise. Il nous faut réactualiser le modèle français ». L’essayiste David Djaïz est là pour présenter son livre « Le nouveau modèle français » qui paraît cette semaine chez Allary Editions.

Bateleur d’aujourd’hui, Djaïz réfléchit à la République, avance des idées et invite chacun et chacune à s’emparer de la question démocratique pour réinventer ensemble du commun. Avant l’été il avait même piloté le « manifeste pour une échelle humaine » avec quarante acolytes pour tenter de brosser un projet collectif.  Dans les questions posées à Djaïz ce jour-là un homme vindicatif lui a reproché de ne pas être « réaliste ».

Étonnamment dans l’esprit de l’auteur de ces lignes cette interpellation de l’auditeur a conduit les pensées vers les surréalistes. Et cette maxime célèbre d’André Breton : « ce n’est pas la crainte de la folie qui nous forcera à laisser en berne le drapeau de l’imagination ». Se replonger dans l’histoire du mouvement surréaliste donne une belle illustration de ce que le collectif peut apporter de nouveau, d’intemporel, de joyeux, de beau et d’innovation dans l’art comme dans la politique ou la société. La littérature qui apparaît comme une aventure solitaire avec les écrivains seuls à leur table de travail est aussi une aventure collective. Elle naît des additions.

Des 2+1, des interpellations des auteurs entre eux. Sans le mouvement surréaliste, sans les jeux collectifs de cadavres exquis, Desnos n’aurait pas été Desnos et Aragon n’aurait pas été Aragon. Il en va de même sur un autre plan du mouvement existentialiste avec Sartre et Camus en figures de proue. Que dire également du collectif si bien huilé du « nouveau roman » avec Robbe-Grillet et Butor comme maîtres à penser, des nouveaux philosophes (BHL, Finkielkrault, Gluksmann etc…) qui accompagnèrent par leurs engagements et leurs livres la fin du totalitarisme.
Ultime résonance qui invite – chacune et chacun – à s’interroger sur les soustractions et les additions. Dans le 11 septembre et le 13 novembre, il y a ce besoin qu’ont les terroristes de soustraire au monde tout ce qui leur manque. Ce que nous dit le jeune Djaïz comme l’histoire littéraire, c’est que nos aventures collectives nous portent plus loin et que, surtout, nos additions sont jolies, puissantes, innovantes et terriblement révolutionnaires !

Bon dimanche d’additions collectives

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