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Les hussards de la République

Jeffrey Hamilton JrRe6er0pY0 Unsplash

“Nous travaillons pour la vie future”, affirme le père, instituteur fier, dans “la Gloire de mon père” de Marcel Pagnol. Christine Renon travaillait pour la vie future. Christine Renon travaillait pour que demain notre pays, notre République puisse être vivable pour tous. Christine Renon travaillait comme le père de Marcel Pagnol à faire en sorte que la France puisse être et rester ce pays dans lequel s’élever par et grâce à la connaissance est la règle.
Christine Renon a rendu les armes. Christine Renon a laissé une lettre et elle est partie. Pour toujours. Dans cette lettre, les mots résonnent avec ceux de Pagnol. “J’ai toujours fait le mieux pour les élèves”, écrit-elle dans ce courrier adressé à l’administration scolaire. Dans cette lettre, on lit la croyance déçue de cette directrice dans cette possibilité de l’école d’être le lieu de tous les possibles, d’être le lieu où l’on construit des ponts entre les rives irréconciliables, d’être le le lieu où s’écrit notre avenir commun. Pendant longtemps, les arts et au premier rang de ceux-ci la littérature ont fait de l’instituteur, du professeur, un personnage central qui était l’ouvrier et l’architecte de la construction d’un temple collectif vivable. Comment ne pas se souvenir de cet instituteur chez Pagnol ? Comment ne pas aimer Keating du Cercle des poètes disparus ? Comment ne pas se souvenir des mots d’Albert Camus adressés à son instituteur, Monsieur Germain, le jour de la remise de son prix Nobel de littérature.

“Sans vous, sans cette main affectueuse que vous avez tendue au petit enfant pauvre que j’étais, sans votre enseignement, et votre exemple, rien de tout cela ne serait arrivé”, écrivait ainsi l’auteur de l’Etranger. Et si nous ne devenons pas tous prix Nobel, il est clair que nous avons tous un “merci” à envoyer à l’un ou l’une de nos professeurs.

Problème : la société, elle, a oublié le rôle pivot et central de ces hussards noirs de la République. Tant que nous ne déciderons pas collectivement de remettre instituteurs, professeurs, directeurs d’école, inspecteurs etc… au centre de notre histoire collective et de notre contrat social, nous prenons le risque de recevoir de nouveaux courriers comme celui de Christine Renon.

Les replacer au centre de notre histoire collective, cela veut dire drastiquement mieux les payer, mais aussi et surtout leur redonner le rôle central dans l’instruction des enfants. Pour que demain devienne ou redevienne réellement possible. Pour que notre République retrouve du sens, elle doit reprendre le chemin de l’école.

Tous les éditos d’Ernest sont là. Ils paraissent initialement dans l’Ernestine, notre lettre dominicale gratuite.

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