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R.Bowen : “Écrire une satire sur le système de classes britannique”

Photo De Rhys Bowen

La rentrée littéraire est là avec son flot de nouveautés pas toujours très gaies. Alors si vous souhaitez un roman qui va vous faire du bien, vous changer l’esprit et vous faire rire, plongez tête baissée dans la série « Son espionne royale » de Rhys Bowen. Cette nouvelle pépite du cosy mystery a été dénichée par les Editions Robert Laffont (collection La bête Noire), de même que la série « les détectives du Yorkshire » de Julia Chapman dont Ernest a été le premier à vous en parler.

Vous serez à coup sûr fascinés par cet univers royal. Au menu : une jeune Lady anglaise des années 30, fauchée comme les blés, qui résout des enquêtes policières, tous les ingrédients sont réunis pour que cette série devienne un succès littéraire en France. Celui-ci est déjà au-rendez-vous Outre -Atlantique ! Rencontre avec Rhys Bowen pour en savoir un peu plus. Un délicieux entretien SO BRITISH !

 Comment est née votre série « Son espionne royale » ?

Mon éditeur avait dit que pour me publier, il fallait que j’écrive un grand roman sombre. J’ai considéré les tueurs en série, les agresseurs d’enfants, les terroristes et j’ai décidé que je ne voulais pas passer six mois dans les ténèbres alors que le monde était déjà si sombre. J’ai alors pensé à une enquêtrice la plus improbable possible. Elle serait de sang royal mais sans le sou. Et j'ai toujours été fascinée par les années 1930 - une telle période de contrastes avec un monde empoisonné par l’affrontement à couteaux tirés entre le communisme et le fascisme.

Votre héroïne Victoria Georgina Charlotte Eugénie Glen Garry et Rannoy (alias Georgie) est la 34e prétendante au trône d’Angleterre, à moitié noble. Elle va devoir travailler, son secret, et être amenée à résoudre des enquêtes policières. Aidée de son grand-père roturier, elle va enquêter pour sauver son frère inculpé de meurtre dans  «  Son espionne royale mène l’enquête » (T1) ou pour déjouer un complot politique dans « Son espionne royale et le mystère Bavarois ». (T2) L’action se passe à Londres en 1932. Le lecteur a l’impression que vous connaissez très bien la royauté et ses codes. Avez-vous des parents nobles comme Georgie ? Quelle est la part de vous dans ce livre ?

Oh absolument. Je suis secrètement une princesse. Désolée, je plaisante. En fait, je suis issue de la classe moyenne, mais j’ai épousé une famille qui peut retracer sa lignée jusqu’à la royauté et qui a inspiré une grande partie de la vie des classes supérieures dans mes livres. Nous avons des cousins avec des surnoms idiots, de grandes maisons de campagne et beaucoup de bonnes histoires. À propos du majordome et des passages secrets.

Et j'ai effectivement rencontré plusieurs membres de la famille royale. Vous m’avez demandé quelle partie était personnelle. Il y en a plusieurs épisodes dans la série, mais l'un d'eux implique la couronne : j'ai déjà pris le thé avec la reine. On ne demande qu'à manger ce que la reine mange et la reine ne mange qu'un seul morceau de pain brun. Nous avons donc dû grignoter poliment tout en regardant tous les gâteaux succulents. J'ai fait souffrir Georgie de manière identique avec Queen Mary. En fait, je fais subir à Georgie beaucoup de choses embarrassantes qui me sont arrivées.

Le lecteur esthappé par cet univers royal mais aussi par ses travers notamment l’hypocrisie. Georgie ne doit pas révéler qu’elle est pauvre à la Reine, elle doit conserver un certain standing et pour cela, elle va contourner les codes et créer son entreprise de femme de chambre «  L’agence du diadème ». Les fêtes auxquelles vont les châtelains ressemblent à des orgies où l’alcool et la drogue sont présents. Les relations extra-conjugales sont plus ou moins autorisées comme le prince de Galles qui prend comme maîtresse une femme mariée. 

A la fin du T1, vous écrivez malicieusement : « Je me suis assurée que les personnages royaux ne font rien qui ne leur ressemble pas et qu’ils jouent leur propre rôle avec exactitude ». Est-ce que tout ce que vous décrivez sur la noblesse est vrai ?

J'ai essayé de faire en sorte que tout ce que le roi ou la reine déclaraient ait été vraiment dit ou exprimé. Je pense que c'est juste de faire ainsi avec un personnage connu. Mais j'écris sur la noblesse dans les années 1930. C'était encore une époque de serviteurs, de grandes maisons, de débutantes. Vous vous attendez à ce que tout soit très différent maintenant, mais à bien des égards, peu de choses ont changé. D'après mon expérience, la noblesse britannique pense vraiment que Dieu les a créés et a ainsi pu se reposer ! Des expressions telles que « NOCD » (pas notre classe, cher) sont encore exprimées. Rappelez-vous que William et Kate ont rompu une fois parce que sa mère était considérée comme d’une classe inférieure, car elle utilisait le mot « toilettes » au lieu de «cabinets». Oui, il existe encore un vocabulaire qui fait perdurer les classes au Royaume-Uni.

 

Son Espionne Royale2L’intrigue policière dans « Son espionne royale et le mystère Bavarois » (T2) est liée à la situation politique, le communisme, mais aussi économique, l’époque de la Grande Dépression à Londres. Le final est grandiose et surprend le lecteur qui se demande comment cette imposture a pu avoir lieu. C’est une espèce de farce.