2 min

Notre Kundera

Kundera

Milan Kundera vient de mourir. Relire cet édito et ne pas en changer une ligne. Milan Kundera, romancier de l’existence, a su comme nul autre en saisir la beauté, la mélancolie, l’absurdité, et la joie. Ses livres sont des talismans pour l’existence. A tout âge, ils apportent une chose nouvelle. Lisez ou relisez Milan Kundera, la vie n’en sera que meilleure. “Il semble qu’il existe dans le cerveau une zone tout à fait spécifique qu’on pourrait appeler la mémoire poétique et qui enregistre ce qui nous a charmés, ce qui nous a émus, ce qui donne à notre vie sa beauté”, écrivait-il dans “L’insoutenable légèreté de l’être.”  Il était très présent dans nos colonnes. Tous les articles qui le mentionnent sont là. 

***

Au hasard d’un déplacement professionnel qui visait notamment à faire connaître Ernest, au détour d’une présentation, l’auteur des ces lignes a cité Milan Kundera. “Le romancier n’est ni historien, ni prophète, il est l’explorateur de l’existence”, écrivait dans “l’Art du roman”, Milan Kundera. En faisant référence à cette maxime de l’auteur, l’idée était de démontrer que le roman par l’expérience sensible qu’il nous fait vivre est beaucoup plus fort pour nous donner les clés de compréhension du monde.

La parole a ensuite circulé et une potentielle abonnée d’Ernest m’a interpellé.
Vous dites qu’Ernest démocratise la lecture et ne se pose pas en surplomb de ses lecteurs et vous citez Milan Kundera, n’est-ce pas un peu contradictoire ?” Et celle-ci de poursuivre : “Je n’ai jamais lu Kundera. Parce que je ne me considère pas légitime pour lire ce genre de livres, pourtant j’aime vraiment la lecture”. Interpellation étonnante tant je n’ai jamais considéré Kundera comme un écrivain de la culture légitime. Bien au contraire. Son style fluide et épuré qui fait appel au sensible est profondément accessible. C’est ce que j’ai tenté de dire à ma potentielle abonnée.
J’ai aussi argumenté sur le fait que justement notre rôle de journaliste, chez Ernest, est de parler de Kundera – non pas de façon académique – mais comme si nous étions ensemble (lecteurs et journalistes) dans un dîner ou une soirée et que nous discutions bouquins.

Et j’ai ainsi dit la chose suivante sur Kundera : “C’est un écrivain qui dissèque les tortures de nos âmes. Qui posent des mots tranchants sur ce que chacun et chacune de nous a pu ressentir un jour en réfléchissant au sens de sa vie, à ses histoires d’amours ou encore à son exil intérieur”. Puis j’ai dit à la dame à quel point “l’insoutenable légèreté de l’être” est un livre lu, relu et re-relu et qui à chaque instant de la vie prend une dimension différente. Je lui ai raconté à quel point les livres de Kundera avaient été des marqueurs de vie. De ceux dont on se souvient très précisément de la première fois où l’on est entré en relation avec eux.
Ensuite, après avoir récupéré le livre dans la librairie, j’ai lu cet extrait : “L’homme ne peut jamais savoir ce qu’il faut vouloir car il n’a qu’une vie et il ne peut ni la comparer à des vies antérieures ni la rectifier dans des vies ultérieures.” Et celui-ci aussi : “Le vertige, c’est autre chose que la peur de tomber. C’est la voix du vide au-dessous de nous qui nous attire et nous envoûte, le désir de chute dont nous nous défendons ensuite avec effroi.
La dame m’a remercié et a acheté le livre. Elle m’a promis de me dire ce qu’elle en a pensé. Un beau cadeau d’anniversaire pour Milan Kundera qui a fêté cette semaine ses 90 ans. Il n’y a pas d’âge pour se faire de nouveaux amis.

Laisser un commentaire