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La bande dessinée, nouveau laboratoire du savoir

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Et si les réflexions les plus inspirantes sur la littérature venaient d’un strip anglais ? Et si les gags de ce cartoonist écossais de 44 ans donnaient du recul sur notre vision de la science au 21e siècle ? Voici les nouvelles lignes d’un dialogue inédit entre culture et pop-culture. C'est le nouvel épisode de "Des bulles et des lignes" signé Thomas Mourier, en partenariat avec Bubble.

COUV Departement GAULD Depuis 2005 Tom Gauld publie des strips & des bandes dessinées dans les colonnes des prestigieux journaux tels que The Guardian et The New Scientist ou encore The New Yorker. Il est non seulement l’un des dessinateurs de strip les plus drôles du moment, mais son travail pose également un œil neuf sur la littérature ou la science. Ses personnages loufoques scrutent nos habitudes à l’ère du numérique, son humour érudit décrypte notre rapport à cette grande culture toujours encensée, mais de moins en moins maîtrisée. Il se moque avec justesse de ceux qui se placent en gardiens du temple, des experts en tous genres ou de la “grande littérature”. À travers ses strips minimalistes, le dessinateur désacralise l’acte créateur, les mythes du talent ou du génie. Dans ses histoires très courtes, il décloisonne les genres, s’amuse des frontières imaginaires entre romans de gare et littérature blanche, ou s’attaque à notre perception fétichiste de ces thématiques… Il déconstruit les mythes liés au monde du livre et de la science à travers ses ingénieuses bandes dessinées.

« C'est très bien de “faire des découvertes”, “sauver des vies” et “améliorer le monde”, Roger. Mais vos travaux ne font aucun buzz sur les réseaux sociaux. »

Ses créations ont en commun de mêler humour, philosophie et idées. Un esprit ludique pour évoquer Shakespeare, Darwin, Kafka, Einstein, Beckett ou Jane Austen ; une débauche de gags pour aborder les genres littéraires, la science ou les tendances culturelles par le prisme de la société de consommation ou les réseaux sociaux. Tom Gauld imprime un renouveau à la fois dans la presse, mais également dans la manière d’aborder la culture dans les médias, prouvant qu’on peut être aussi ludique que critique, aussi malicieux qu’absurde.

DEPARTEMENT INTERIEUR WIP2.inddReconnaissable entre mille, son trait est ultra-minimaliste. Quelques formes géométriques, des personnages réduits à une tête ronde sur un triangle, des cases pleines de schémas ou d'icônes qui empruntent aux langages scientifiques : le dessinateur invente ses propres codes entre bande dessinée, dessin de presse et illustrations scientifiques. Un style méticuleux fait de schémas et de bonshommes bâtons, inspiré, selon lui, des Legos, à la fois pour la simplicité des personnages que pour le côté briques à empiler, et leur infinité de combinaisons. Sa force est de caractériser ses protagonistes avec un détail unique ou de traduire en quelques signes un classique de la littérature. Au fil des gags, il compose un abécédaire subtil et personnel, un travail influe aussi dans les planches de ses albums de fiction : Police lunaire, Vers la ville, Goliath.