2 min

Matignon, l’enfer que l’on aime

Matignon DM

Cette semaine, Frédéric Potier nous parle du roman de Gilles Boyer sur Matignon.  Des coulisses et de la nostalgie de Matignon qui malgré l'enfer qu'il peut être est aussi un lieu magique. Utile lecture à l'heure où l'actuel Premier ministre reçoit les partenaires sociaux.

Le jour de mon arrivée à Matignon comme conseiller en avril 2014, j'ai posé mes cartons dans mon bureau jouxtant le grand jardin qui relie la rue de Varenne à la rue de Babylone. Je ne les ai jamais défaits en plus de trois ans. En face de moi, j'avais volontairement laissé bien en vue un rappel visuel indiquant que tout pouvait s'arrêter du jour au lendemain. Tous les matins, ces cartons non défaits me rappelaient la précarité du job et une réalité crue : nous occupions un lieu de pouvoir, nous ne l'habitions pas.

Gilles Boyer, ancien conseiller politique d’Édouard Philippe, aujourd'hui député européen signe un joli roman intitulé "Le maître d'hôtel de Matignon" qui dresse un portrait de ce lieu aussi attachant que terrible, l'hôtel de Matignon. Plus précisément, il fait parler un personnage éminemment sympathique et essentiel au fonctionnement de la machinerie matignonesque, à savoir le maître d'hôtel. Claude, c'est son prénom, existe vraiment. Seul le nom de famille a été changé par l'auteur. Claude a servi treize premiers ministres, ou treize "pachas" selon l'expression qu'il affectionne. Claude c'est l'homme des petites attentions, des petits gestes qui font que les premiers ministres ne sont pas complètement assommés par leur tâche. Le maître d'hôtel supervise les déjeuners, les diners, l'habillement, les déplacements. Bref, nul n'est plus dans l'intimité des hommes et des femmes de pouvoir CVT Le Maitre Dtotel De Matignon 3394que lui. Que ce soit à Paris, en province, à l'étranger ou en outre-mer, sa présence chaleureuse rassure les premiers ministres et leurs entourages. Car Claude a poussé l'abnégation jusqu'à s'occuper des plus humbles conseillers, la tête dans leur guidon (moi c'était plutôt dans la canne à sucre d'ailleurs) et corvéables à merci...